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Employabilité : se préparer aux métiers et compétences de demain… dès aujourd’hui ?

L’Institut de l’entreprise a présenté, lors d’une conférence de presse, son rapport sur l’évolution des formes d’emplois et sur l’employabilité. Intitulé L’emploi à vie est mort, vive l’employabilité !, celui-ci s’intéresse tout particulièrement « aux conditions qui, à moyen et long terme, permettent aux actifs de s’adapter à l’évolution de leur métier, voire d’anticiper d’éventuelles reconversions. » Aller au delà, en somme, de la simple question de la formation professionnelle en y intégrant une part importante d’évolutivité.

Le numérique et l’automatisation marquent-ils la fin de l’emploi (tel que nous le connaissons) ?

Une réflexion qu’il faut absolument mener selon le think-tank, « dans un contexte  d’innovations continues, liées au numérique et à l’automatisation, qui commencent déjà à bouleverser la structure de l’emploi« . Un bouleversement qui resterait pour autant largement sous-estimé, en particulier sur deux aspects :

  • L’automatisation de certains métiers

Kodak vintage adComplément ou substitution du travail humain, l’automatisation voire la « robotisation » de nombreux métiers n’est plus de l’ordre de la science-fiction. Et ne concerne pas seulement le secteur de l’industrie. Transport, logistique, services à la personne… L’impact est diffus et devrait, à terme, modifier durablement les besoins et attentes des entreprises et des travailleurs. C’est à dire les métiers eux-même.

Selon diverses études, ce n’est rien de moins que 45 à 55% des emplois qui pourraient être automatisés d’ici 20 ans, en fonction de leur localisation géographique.

  • Les transformations de l’économie

Technologie de rupture, le numérique bouleverse des pans entiers de l’économie, et en particulier les business model de nombreuses entreprises. Commerce, industrie ou service, aucun secteur n’est épargné. A chaque entreprise la tâche de se réinventer sans cesse en prenant en compte ces évolutions.

Penser les transformations du travail à moyen et long terme

« Aujourd’hui, dans la sphère politique, il y a une focalisation sur le chômage. De nombreuses actions sont menées, qui visent principalement le court terme. Mais il ne faut pas oublier ni le moyen, ni le long terme« , prévient Denis Monneuse, co-rapporteur.

Et c’est en ce sens que la question de l’employabilité, entendue comme « la capacité d’un individu à obtenir un emploi acceptable compte tenu de l’adéquation de ses caractéristiques personnelles, en particulier ses compétences, aux besoins du marché du travail« , intéresse plus particulièrement le groupe de travail, présidé par Jacques Gounon (PDG du Groupe Eurotunnel).

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Demain, les soft skills plus valorisés que les diplômes ?

Pour l’Institut de l’entreprise, il est impossible de prévoir précisément les métiers et les compétences de demain. L’action de la formation initiale pour développer l’employabilité s’en retrouve limitée.

« C’est donc avant tout une culture de l’employabilité qu’il convient de développer afin que chacun des acteurs se préoccupe de ce sujet en l’ayant toujours à l’esprit.« 

Et pour la favoriser, le think-tank émet plusieurs propositions, parmi lesquelles le renforcement de la mobilité géographique et fonctionnelle, la fin du « culte » du diplôme ou encore une anticipation accrue des besoins en compétences.

  • Renforcer la mobilité géographique et fonctionnelle

Et si l’entreprise valorisait la mobilité plutôt que l’ancienneté ? « Des primes de mobilités internes pourraient ainsi se substituer aux primes d’ancienneté« , avance par exemple le rapport, qui dénonce un possible effet de « prison dorée » (certains salariés pourraient être tentés de préférer conserver leurs avantages matériels en restant à leur poste malgré une insatisfaction au travail), au détriment de l’entreprise. Un processus de mobilité qui, selon beaucoup d’entreprises, devrait être pensé dès la phase de recrutement, d’autant plus lorsque l’on sait qu’un cadre de moins de 35 ans par exemple change en moyenne de poste tous les… 2,9 ans.

You are here signQuid de la mobilité fonctionnelle (changement de poste ou d’affectation), interne ou externe ? Pour l’Institut, le service public de l’emploi a un véritable rôle à jouer. En particulier en incitant « les demandeurs d’emploi présents dans des secteurs sans débouchés à se reconvertir dans un autre domaine« . Ce qui nécessite, en amont, un diagnostic de l’employabilité de chaque nouvel inscrit et une utilisation plus affinée des big data. Des big data que Pôle Emploi commence par ailleurs à utiliser activement dans une optique de sourcing des offres. Une évolution que promeut outre-Rhin l’ancien DRH de Volswagen : alors que questionnaires et algorithmes peuvent désormais fournir un « diagnostic des talents », dans une optique de mise en valeur des atouts de chacun, une base de données informatiques pourrait être utilisée en parallèle comme un « radar pour l’emploi ». En fonction de son profil, chacun serait orienté en fonction  des gisements d’emplois existants… et à venir.

La mobilité géographique est aussi un point déterminant de la mobilité et de l’employabilité. Si plus de flexibilité en ce domaine est évoquée, comme par exemple en autorisant « l’employeur à modifier le lieu de travail, dans un périmètre à définir, sans que cela constitue une modification substantielle des éléments du contrat de travail« , des incitations financières pourrait également être proposées. Le rapport propose par exemple que l’État rende non-imposables les primes de mobilité versées par l’employeur ou encore que l’État ou les collectivités territoriales abondent la prime versée « dans le cas d’une mobilité géographique vers une zone peu attractive« .

  • Sortir du culte du diplôme : place aux soft skills et au big data

Communication orale, maîtrise des codes sociaux, négociation, leadership, curiosité ou encore humilité… autant de soft skills qui sont utiles quelque soit le parcours professionnel. Des compétences aisément transférables donc, peu sujettes à évoluer rapidement, mais qui restent trop peu valorisées par les recruteurs.

« Il faut laisser un peu le diplôme de côté et penser aussi aux compétences. Tout simplement car les métiers évoluent très vite !« , note Laetitia Strauch, co-rapporteuse.

Le rapport préconise d’ailleurs d’informer les employés « dès la formation initiale des passerelles qui existent vers d’autres types de métiers ou de secteurs que ceux auxquels prépare directement la formation« . Une manière de bien prendre en compte les capacités et le potentiel de chacun ; et de ne pas se limiter à un poste ou un secteur en particulier. « En Allemagne par exemple, on s’est rendu compte que certaines compétences prisées dans le secteur de la boulangerie étaient également utilisables dans celui de la chimie« , précise Laetitia Strauch.

L’utilisation des big data peut également être un accélérateur de cette évolution. Outre l’élimination des biais traditionnels, l’utilisation des données (via des questionnaires par exemple) permettrait de valoriser ces soft skills, au détriment des plus traditionnels diplômes ou l’expérience passé sur un poste. « À l’heure actuelle certaines entreprises s’intéressent à des candidats n’ayant pas fréquenté l’université mais excellents à des postes techniques ou commerciaux, souvent autodidactes, y compris pour des postes de direction« , note le rapport. Google semble, d’ailleurs, ne pas être insensible à ce mouvement.

  • Anticiper les besoins en compétences de demain

shipyardSi l’anticipation des besoins n’est pas (encore ?) une science exacte, il convient néanmoins de la développer. Cela peut par exemple être le cas sur le plan territorial :

« Dans un souci de responsabilité sociétale mais aussi de performance économique, les  employeurs ont intérêt à participer à une logique d’écosystème sur leurs territoires plutôt que de se comporter en simple consommateur de la main-d’œuvre locale.« 

La création par l’État de 13 plateformes économiques d’appui aux mutations économiques va d’ailleurs en ce sens. Concrètement, les PME locales de Saint-Nazaire sont par exemple accompagnées dans leur migration du secteur naval vers l’aéronautique.

Une anticipation affinée et accrue peut également passer par la mutualisation des moyens des branches professionnelles, avance l’Institut de l’entreprise. Du fait de leur nombre important (plus de 750 contre à peine une centaine en Allemagne), les moyens en sont d’autant limités, de même que la vision qu’elles pourraient avoir. Une mutualisation permettrait une prospective plus globale ou encore une observation des effets de l’automatisation des métiers plus générale, ce qui permettrait de mieux anticiper les besoins de demain en termes de compétences, « en mettant l’accent sur l’évolution qualitative des métiers« .

« Le titre du rapport est un peu provocateur, c’est vrai. L’idée n’est pas de dire que le CDI est mort en France ou qu’il n’existera plus demain. Ce qui est vrai par contre, c’est que l’on ne fera pas le même métier toute sa vie. Ce que nous disons dans ce rapport, c’est que c’est à chacun, entreprise et employé, de se coresponsabiliser sur cette question cruciale », résume en guise de conclusion Denis Monneuse.

Pénuriedetalents

 

 

 

Crédits images : stevlep187 & fdecomite & Britt-Marie Sohlström & Ryan Taylor / flickr / licence creative commons
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