Dans ses Tendances mondiales de l’emploi 2013, l’Organisation internationale du travail (OIT) tire à son tour la sonnette d’alarme sur la « Grande Inadéquation » :
« La crise a obligé des millions de travailleurs à chercher un nouvel emploi mais, souvent, leurs qualifications ne sont pas celles que recherchent les employeurs, et cette inadéquation des compétences fait grimper les taux de chômage. »
Demain, tous au chômage ?
Les salariés des secteurs les plus frappés par la crise se reconvertissent difficilement car ils possèdent rarement les compétences recherchées par les secteurs épargnés. Et l’évolution de nos besoins, la mondialisation de l’économie et du marché du travail ainsi que les changements technologiques continuent à transformer radicalement l’emploi. Certains posent la question : demain, tous au chômage ?
L’OIT ne va pas si loin, mais cette « Grande Inadéquation » – et les pénuries de Talents qui en sont la conséquence – « affecte le marché du travail dans tous les pays ». McKinsey a calculé qu’elle pourrait faire perdre 4,5 millions d’emplois rien qu’en France d’ici 2020.
Double peine, surqualification, émigration subie : la Grande Inadéquation fait mal
Theo Sparreboom, économiste du travail, creuse : « Ces décalages de compétences signifient que les demandeurs d’emploi ont besoin de plus de temps pour trouver un nouvel emploi ce qui, par ricochet, alimente le chômage de longue durée ». En France, la durée du chômage d’un salarié qui subit un licenciement économique est deux fois plus longue que pour un intérimaire ou un salarié en fin de mission. On a aussi identifié un « effet de scarification » et le cercle vicieux du chômage de longue durée…
Pour ceux qui ont échappé au chômage, l’OIT déplore une « multiplication du nombre de « travailleurs surqualifiés ». De nombreux salariés subissent en effet un « déclassement professionnel », ayant du accepter un emploi à un niveau inférieur à celui pour lequel ils sont qualifiés. Pour trouver un travail correspondant à leurs compétences, des Espagnols ont du s’expatrier en Allemagne, des Portugais en Angola.
Pour combler le fossé, former
L’OIT se veut rassurant, ce décalage de compétences peut « n’être qu’un phénomène transitoire »:
« Il faut en faire davantage pour combler le fossé entre les compétences disponibles et ce que les employeurs demandent. La clé, c’est (…) le développement des compétences.
Nous recommandons que les responsables politiques prennent des initiatives coordonnées afin de réduire le chômage, y compris des services pour améliorer l’efficacité de la recherche d’emploi et faire concorder l’offre et la demande de travail, notamment en investissant dans des programmes de formation et de reconversion professionnelles. »
Individuals need to relentlessly pursue opportunities to cont. to build capabilities; Employers need to find Teachable Fit, not perfect fit
— Britt Zarling (@BMZARLING) 24 janvier 2013
La clé : l’anticipation collaborative
Dans la ligne de mire, il y a la fameuse GPEC (gestion prévisionnelle des emplois et des compétences). Si son potentiel est immense, on lui reproche souvent d’être menée de manière beaucoup trop court-termiste. Or dans l’ère d’incertitude dans laquelle nous vivons, seule la prise en compte combinée des signaux forts et des signaux faibles, et de leur impact sur les compétences dans les bassins d’emploi – les caractéristiques économiques de Toulouse ne sont pas celles de Calais -, permettent une anticipation bien menée par les acteurs économiques qui doivent agir en partenaires. C’est une attitude qui se développe dans le secteur aéronautique notamment, et qui devrait s’amplifier.
Pour en savoir + :
- Le communiqué de presse et l’étude Tendances mondiales de l’emploi 2013 (pdf) de l’OIT.
- Enquête « Pénurie de Talents » de ManpowerGroup, éditions 2011 et 2012.
- « L’emploi en France en 2020 – McKinsey et la Grande Inadéquation » : les 4,5 millions d’emplois en jeu en France.
- Solutions : développer une approche de long terme du recrutement et de la formation, miser sur les gisements de Talents inexploités, rapprocher l’école de l’entreprise, développer les partenariats et apprendre à naviguer dans l’incertitude.
- Un bassin d’emploi dynamique : Toulouse, où l’aéronautique anticipe ses besoins et forme en conséquence.