Ne pas baisser les bras face à la crise et trouver des solutions locales au chômage, dès aujourd’hui et pour demain. Voilà ce qui a conduit la Fondation ManpowerGroup et Pôle Emploi à s’unir pour organiser, le mois dernier, dans quatre grandes villes de France, des job-datings originaux et des rencontres entre responsables politiques, experts et chefs d’entreprise locaux.
Plus de 300 entreprises participantes, 1 850 postes en CDI proposés, plus de 3 200 entretiens réalisés : les job-datings de Toulouse, Rennes, Marseille et Paris, ont rempli l’objectif que Bernard Nebout, directeur général de la Fondation ManpowerGroup, leur avait assigné : « Apporter des réponses rapides à l’urgence des situations avec une méthode simple : mettre en relation directe des demandeurs d’emploi et des entreprises qui ont du mal à recruter, en s’affranchissant des filtres habituels, qui brouillent trop souvent la personnalité et la motivation réelles des candidats – deux facteurs clés d’un recrutement réussi. »
« Agissons pour l’Emploi », c’était aussi une réflexion prospective visant à identifier les gisements d’emplois d’aujourd’hui et de demain. Dans chaque ville a été organisé un grand débat où acteurs publics et privés de l’emploi, responsables politiques, associatifs et chefs d’entreprise ont échangé leurs points de vue et leurs expériences pour mieux définir ensemble les perspectives réelles des bassins d’emplois dans lesquels ils agissent et investissent quotidiennement. Parce qu’agir pour l’emploi aujourd’hui, c’est aussi anticiper les transformations de demain. Voyage à la rencontre des atouts français.
Toulouse : la championne de France des créations d’emplois
Toulouse est le bassin d’emploi le plus dynamique de France en termes de création d’emplois (+29,7% sur 10 ans). Son atout numéro un : une filière aéronautique et spatial puissant. Airbus, sa locomotive, a recruté 5000 salariés en France ces deux dernières années, 80% d’entre eux dans l’agglomération de la ville rose. Ce dynamisme industriel irrigue l’ensemble de l’économie de la région, et même du pays.
Pourtant, le chômage a bondi de 8% dans la ville rose en 2012. Toulouse est presque trop attractive, et d’autres territoires de la région Midi-Pyrénées restent à l’écart du dynamisme. Surtout, la filière aéronautique éprouve beaucoup de mal à trouver les profils qualifiés dont elle a besoin. Les sous-traitants d’Airbus, qui prévoient 9 000 recrutements d’ici 2014, sont en difficulté : « C’est paradoxal, nous avons un nombre de chômeurs important et il est difficile de recruter ». Des pratiques innovantes fleurissent pour mieux anticiper les besoins et former en conséquence.
Lors du débat, des pistes supplémentaires pour résoudre l’inadéquation entre offre et demande ont émergé : favoriser un écosystème autour d’ « entreprises étendues », promouvoir les métiers industriels, stimuler la mobilité et les reconversions professionnelles, encourager une formation plus « agile ». Une évolution qui profiterait à toute la France.
Marseille : PME innovantes, emplois stratégiques et esprit de conquête
Marseille, capitale « des sachets de lavande » ? Loin de ce cliché, la cité phocéenne regorge d’atouts… mais elle est fragile : troisième bassin d’emploi le plus créateur de richesses en France, Marseille manque de dynamisme et dépend trop des revenus extérieurs. Avec une économie fortement « présentielle », orientée vers les services de proximité, ne se reposerait-elle pas trop sur son attractivité ?
Capitale européenne de la culture 2013, Marseille semble portée par une nouvelle ambition : devenir « la » métropole euroméditerrannéenne. Bénéficiant d’un tissu de PME innovantes dynamiques, elle doit concentrer ses efforts pour les renforcer, et pour cela stimuler la création de véritables écosystèmes riches en « emplois stratégiques ». Pôles de compétitivité, grappes d’entreprises, polarisation au sein du projet « Marseille Provence Métropole » : le nouvel élan est déjà tangible.
Le débat a porté un message fort : à Marseille et en région PACA, il faut doper l’esprit entrepreneurial et développer les synergies entre les acteurs du territoire. L’innovation, technologique comme sociale, paraît la clé d’un redressement durable de l’emploi.
Rennes : du déclin industriel à la renaissance numérique
Saviez-vous que c’est en Bretagne que sont nés des langages informatiques tels que les célèbres JPG, MPG, ou encore le MP3 ? Dans cette région, le numérique a connu une croissance de plus de 25% entre 2005 et 2010, il représente aujourd’hui plus de 42 000 emplois. Grandes entreprises, PME innovantes, technopoles créateurs d’emplois, laboratoires de recherche de pointe… c’est un véritable écosystème qui existe aujourd’hui. La Bretagne est, par exemple, devenue un leader des réseaux très haut débit, de la TNT et de la 3D.
Mais la « Grande Inadéquation » des compétences menace Rennes et la Bretagne numérique : les « profils technologiques » sont la deuxième catégorie la plus difficile à trouver pour les recruteurs de la région. Les formations ne sont plus adaptées aux besoins, la compétitivité est en péril. La Bretagne est en train de réagir et met en place une stratégie de synergies entre filières qui devrait irriguer l’ensemble de son économie.
Lors du débat, les acteurs de la « filière mondiale du numérique » bretonne ont appelé la France à « se réapproprier l’ambition numérique » : aujourd’hui, tous les métiers et secteurs d’activités sont révolutionnés par les TIC. Le développement de doubles compétences (techniques et relationnelles) paraît, notamment, indispensable pour que le numérique devienne un véritable gisement d’emploi.
Paris et le tourisme : la montée en gamme des services, un tremplin pour l’emploi
La première destination touristique mondiale, c’est Paris et sa région. Cette attractivité exceptionnelle est un moteur pour l’économie : plus de 70 000 entreprises la font vivre, dont près de 10 000 ont été créées rien qu’en 2010. Les activités touristiques en Ile-de-France, ce sont 500 000 emplois, soit près de 10% des salariés de la région. Mais ce pourrait être bien plus si Paris et sa région réussissaient à prendre le virage de la qualité de service pour capter les recettes du tourisme mondialisé et de la nouvelle classe moyenne venue en masse des pays émergents : près de 2 milliards de personnes voyageront à l’étranger chaque année d’ici 2030…
Paris est mal partie, la qualité de ses services touristiques n’est pas à la hauteur du défi. Premier obstacle à cette montée en gamme : dans l’hôtellerie-restauration (qui représente 80% du tourisme), 20 000 postes restent vacants en Île-de-France, malgré le chômage. Un gâchis, surtout pour les jeunes peu ou pas diplômés – premières victimes de la poussée du chômage. L’inadéquation entre l’offre et la demande est patente et les jeunes sont très mal orientés.
Paris dispose de toutes les armes pour redresser la situation et faire de son attractivité un véritable tremplin pour l’emploi de tous les talents. Une condition, posée par les acteurs et experts lors du débat : faire preuve d’« intelligence sociale ».