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Formation : quand compétitivité rime avec épanouissement

Le développement des compétences par la formation professionnelle est devenu un enjeu politique important, mais les entreprises n’ont pas attendu cette prise de conscience pour s’investir – souvent au-delà de leurs obligations légales. Une récente enquête menée auprès des salariés, DRH et responsables de formation en Europe, montre que la formation à déjà largement évolué afin de répondre aux évolutions du monde du travail, pour le meilleur de la satisfaction des salariés.

 

En France, la formation professionnelle a été adoubée par l’Etat avec la loi du 16 juillet 1971. Dès l’origine, ses objectifs sont ambitieux : le développement des compétences est envisagé comme un outil au service de l’épanouissement individuel et du « progrès » de la société dans son ensemble. Les termes de l’article 1er de la « loi Delors » sont éloquents :

« L’éducation permanente constitue une obligation nationale. Elle a pour objet d’assurer à toutes les époques de sa vie, la formation et le développement de l’homme, de lui permettre d’acquérir les connaissances et l’ensemble des aptitudes intellectuelles ou manuelles qui concourent à son épanouissement comme au progrès culturel, économique et social. »

Les principes de formation professionnelle continue reposent dès les années 70 sur une double finalité :

  • collective : améliorer la compétitivité de notre pays dans la concurrence internationale ;
  • individuelle : enrichir les parcours professionnels, donc la liberté de choix et le bien-être des salariés.

La formation professionnelle est devenue un enjeu politique majeur

Rapidement, avec l’apparition du « chômage de masse », la formation a aussi été envisagée par l’Etat et les collectivités territoriales comme un levier de lutte contre le chômage et les candidats à l’élection présidentielle ont, logiquement, tous développé des propositions en la matière. Aujourd’hui, alors que « les compétences sont devenues la monnaie mondiale du 21ème siècle » (l’expression est de l’OCDE), la formation professionnelle apparaît incontournable – ce qui se vérifie dans la hausse récente des dépenses qui lui sont consacrée.

Mais, avec une crise financière qui contraint les budgets, la question de l’efficacité et de l’efficience des dépenses est devenue particulièrement importante. C’est la raison pour laquelle la réorganisation du système et de son financement est assez largement abordée dans le rapport Larcher, qui soulève de nombreuses questions.

Formation pro & apprentissage - Dépenses globales

Les entreprises, acteurs engagés de la formation professionnelle continue

Soumises dès l’origine à une obligation légale de financement, les entreprises sont au fondement des dispositifs de formation continue. Mais nombreuses sont celles qui, conscientes de leur intérêt à développer les compétences, vont bien au-delà de cette obligation.

Formation professionnelle - contributeurs

Cet engagement dans la formation n’est pas propre qu’à la France. Une enquête du groupe Cegos, menée auprès de salariés, DRH et responsables de formation dans six pays d’Europe (France, Allemagne, Espagne, Italie, Hollande et Royaume-Uni), permet de mieux connaître les pratiques et attentes en la matière.

Des progrès salués par les salariés

Premier enseignement : les salariés d’Europe constatent des progrès qui doivent être salués : plus d’un sur deux (58 %) estiment que leur entreprise porte davantage d’intérêt à la formation qu’auparavant, et près des deux tiers (63 %) des salariés européens considèrent que l’accès à la formation s’est amélioré ces dernières années. La même satisfaction domine quant aux dispositifs mis en oeuvre par les entreprises pour définir les besoins en matière de formation (67 %), mais aussi pour :

  • identifier les compétences nécessaires (74 % de satisfation) ;
  • les aider à comprendre l’évolution des métiers de l’entreprise (70 %).

L’implication des salariés dans la formation, source de satisfaction

L’enquête montre que 93 %des salariés européens sont satisfaits de la qualité des formations reçues . Les Britanniques sont les plus fervents supporters de la formation (au Royaume-Uni, près d’un salarié sur deux est très satisfait), tandis que les Français se situent globalement dans la moyenne européenne. Selon Cegos, la principale cause de cette satisfaction est à trouver dans l’implication des salariés.

Satisfaction !

Loin d’être des bénéficiaires « passifs », nombre d’entre eux sont demandeurs : dans près d’un cas sur deux (44 %), il s’agit même d’une initiative personnelle.

Concernant les modalités de la formation, on constate partout le « boom des formations mixtes et du tutorat » et une stagnation des solutions 100% e-learning.

La formation en « présentiel » reste la norme, le blended learning progresse

90% des salariés qui ont bénéficié d’une formation ont suivi la méthode classique de formation en salle (dite « présentielle »). Cette proportion baisse très légèrement depuis deux ans et la France se situe au-dessus de cette moyenne, avec 95% de salariés concernés. Si, selon Les Echos, ce « retard » serait typique d’une France trop peu innovante en la matière, le groupe Cegos relève que « ce format reste [partout] le plus apprécié, avec un taux de satisfaction de 95 % ».

Pendant logique de cette prédominance : les formations 100 % à distance concernent moins d’un utilisateur sur deux (43 %) ; elles sont même en perte de vitesse (-2 points par rapport à 2011). A l’inverse, les solutions mixant présentiel et e-learning (« formation mixte » ou blended learning) connaissent une progression constante depuis 2010 : 39% d’utilisateurs, soit +8 points en 2 an.

Modalités de la formation en Europe - enquête Cegos

Pour capitaliser sur les savoirs et les transmettre, le tutorat a le vent en poupe

La présence humaine est donc loin de disparaître, ce qui se confirme par la vogue du tutorat (ou coaching). De 35 % en 2010, cette pratique concerne 47 % des salariés formés en 2012. Laurent Reich, manager en ingénierie pédagogique chez Cegos, explique :

« Le tutorat est une possibilité qui intéresse de plus en plus d’entreprises. Nous le constatons quotidiennement via de nombreux appels d’offres pour sélectionner des tuteurs, les former ou plus largement définir une politique tutorale. En France tout particulièrement, les accords séniors incitent à recourir à des tuteurs pour capitaliser sur les savoirs et les transmettre aux nouveaux embauchés ».

Les DRH prennent conscience du potentiel des différents modes de formation

Laurent Reich, décrypte ces dernières tendances :

« On atteint sans doute un plafond pour les formations 100% e-learning, qui restent toutefois efficaces pour former rapidement un très grand nombre de personnes. Néanmoins, les DRH prennent peu à peu conscience du potentiel des différentes modalités pédagogiques disponibles pour rendre les projets de formation plus pertinents et plus efficaces. »

Le e-learning soutient tous les niveaux de qualification, à tous âges

Une diversité des outils qui peut soutenir tous types de populations. L’enquête montre en effet que l’attrait des technologies pour la formation n’est pas l’apanage des jeunes et des cadres :

  • Kompanyles ouvriers et employés sont même plus nombreux que les cadres à considérer que les formations via tablettes ou mobiles répondent à leurs attentes (93 contre 87 %) ;
  • « les plus jeunes ne sont pas forcément les plus technophiles : si 82 % des moins de 25 ans apprécient de se former avec des tablettes tactiles… 92 % des plus de 45 ans se prononcent en faveur de ces supports », indique Cegos.

Les moins qualifiés, oubliés de la formation

Malgré ce potentiel, l’enquête confirme aussi, hélas, les inégalités d’accès à la formation. Alors que les budgets sont tendus, les salariés les plus fragiles bénéficient très peu des efforts.

« Les DRH souhaitent focaliser leurs investissements en formation principalement sur les jeunes et les personnes considérées comme des « talents ». Former les personnes dont l’employabilité est menacée n’arrive qu’en dernier rang des actions prioritaires (prioritaire pour seulement 28 % des DRH).« 

Il serait ainsi peut-être opportun que soient développées des mesures de soutien spécifique à la formation des populations qui ne sont pas au centre des préoccupations stratégiques des entreprises.

Les motivations des salariés  : un malentendu avec leurs DRH ?

Autre point intéressant l’enquête : les attentes déclarées par les salariés ne sont pas celles perçues par leurs DRH. En effet, alors que les premiers disent rechercher avant tout l’épanouissement professionnel et personnel (65 % des réponses) et la perspective d’une plus grande efficacité au travail (65 %) au travers de la formation, leurs DRH pensent pourtant qu’ils recherchent avant tout là maximiser leurs gains financiers : obtenir une promotion (selon 64 % des DRH) ou augmenter leurs revenus (58 %).

Analyse de Mathilde Bourdat, responsable de l’offre « Management de la formation » chez Cegos :

« Il y a un écart entre la perception des DRH quant à la maturité des salariés au regard de la formation et les véritables motivations de ces derniers. Cet écart peut générer des erreurs de communication, ou encore des malentendus dans l’utilisation des dispositifs d’accès à la formation. »

Des incompréhensions dont il faudra tirer des leçons, à l’heure où les entreprises doivent construire « tout un écosystème RH 2.0 ».

 

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