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La notion de réussite a changé en une génération

3.000 entrepreneurs, cadres supérieurs ont été interrogés dans dix pays (Allemagne, Brésil, Chine, Etats-Unis, France, Inde, Maroc, Royaume-Uni, Russie et Singapour), dans le cadre d’une enquête menée par l’institut CSA pour l’Essec.. Cette étude montre que le sentiment de réussite est fondé avant tout sur des valeurs humaines, plus collectives qu’individuelles. La volonté de mener une « vie bonne » progresse, au détriment de l’individualisme, de l’idéologie du succès et de l’obsession de la performance.

Les leaders ont bien changé ! Arrivés à un certain niveau de réussite, le « toujours plus » disparaît, à la différence de ce qu’on pouvait constater dans les années 1970 ou 80. Avoir une famille heureuse (96 %), de vrais amis (95 %), du temps libre (93 %), et vivre en conformité avec des principes moraux (91 %) est devenu bien plus satisfaisant en termes de sentiment de réussite qu’effectuer une belle carrière professionnelle ou gagner de l’argent ; sauf au Brésil, au Maroc, et en Inde où la carrière est le signe d’une vie réussie -soit « là où les individus sont empêchés parfois de se réaliser professionnellement comme ils le souhaiteraient », analyse Pierre Tapie, directeur général de l’Essec et président de la Conférence des grandes écoles, dans La Tribune.

Aujourd’hui, la réussite prend donc tout son sens dans les relations de travail : à la question de savoir ce qu’ils estiment avoir pour l’instant le mieux réussi dans leur vie professionnelle, les cadres de 9 des 10 pays étudiés répondent qu’il s’agit des relations avec leurs collègues. Selon Pierre Tapie, « l’importance des relations entre collègues est à rapprocher des critères de décision lors des recrutements où la qualité de vie au travail prime désormais sur le salaire ».

Notons aussi que, si 8 pays sur 10 placent l’intelligence comme déterminant de la réussite professionnelle au sommet de la pyramide, les Français et les Chinois, eux, mettent en avant « les relations et le réseau ». « Cela en dit long sur le désarroi de la méritocratie à la française », se désole Julien Carette, directeur général adjoint d’Euro RSCG, dans La Tribune. Et que pour 59% des Français interrogés, réussir sa vie professionnelle c’est avant tout « créer et savoir distribuer ». Un avis surtout partagé par les Brésiliens (79 %) et les Marocains (83 %), mais aussi les Américains (51 %), Allemands (51 %), Anglais (50 %) et, dans une moindre mesure, les Indiens (42 %) -seuls les Chinois préférant largement (79 %) « accumuler ».

On peut aussi relever que le rêve de devenir entrepreneur mobilise les managers des pays émergents alors qu’il attire moins en Europe et aux États-Unis. De manière assez étonnante, 59 % des Français estiment que faire carrière dans une entreprise constitue un signe de réussite plus fort que monter sa propre entreprise.

On retrouve l’aspiration à « l’humain » dans le fait que, en Occident, la petite entreprise est plus souhaitée qu’un grand groupe : parmi les personnes interrogées, 62 % des Français, 60 % des Américains, 57 % des Marocains et 55 % des Allemands placent la première en tête de leurs aspirations .

Mais l’individualisme n’a pas totalement disparu : la majorité souhaite plutôt monter en responsabilité et progresser personnellement que déléguer et faire progresser les autres -et cet objectif est particulièrement prégnant chez les managers et entrepreneurs. Selon Sophie Péters, de la Tribune, la gestion des ressources humaines des directions d’entreprises devraient prendre en compte cet élément pour évoluer, notamment en revalorisant les fonctions managériales.

La personnalité qui incarne unanimement la réussite est Bill Gates ; celui-ci représente en effet un entrepreneur complet ayant bâti un groupe mondial et performant tout en faisant preuve de philanthropisme une fois la réussite installée.

Ainsi, l’on voit bien que les cadres tiennent à allier performance et humanisme. La réussite professionnelle pouvant alors être considérée comme un élément d’une quête de sens.

Citations

  • « Les valeurs portées par une génération de 35-45 ans polarisés par l’argent et la réussite professionnelle sont en train d’être dépassées par celles de la suivante, qui recherche l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle, ainsi que par celles des jeunes diplômés que j’observe, très investis dans les questions publiques et l’entreuprenariat social. Beaucoup de jeunes jouent collectif au sein de leur tribu, dans un désir de servir la collectivité ». Pierre Tapie, Directeur général de l’Essec et président de la Conférence des grandes écoles.
  • « La planète ne va pas bien mais ces jeunes actifs, qui sont pour la plupart « en situation », ont l’air d’en avoir conscience et de vouloir se saisir du problème. C’est une bonne nouvelle ». Pierre Tapie, Directeur général de l’Essec et président de la Conférence des grandes écoles.
  • «Quand, dans les pays émergents, plus de 80 % des CSP+ interviewés sont prêts à consentir à des sacrifices, contre à peine plus de la moitié dans la vieille Europe et aux États-Unis, on voit clairement s’affronter deux modèles. D’un côté, celui de l’Occident, avec des gens installés et une réussite déjà acquise qui les rend moins prompts à renoncer à quoi que ce soit. Et, de l’autre, celui des pays émergents, davantage prêts à s’oublier pour construire leur avenir. Cette situation est préoccupante pour les entreprises car toutes les études sociologiques montrent que ce n’est pas avec les gens bien installés que l’on fait bouger les choses, mais avec ceux qui sont au contraire prêts à tout bousculer ». François Dupuy, sociologue des organisations, auteur de Lost in Management (Seuil).
  • « L’universalité de Bill Gates montre que les progrès à accomplir se situeront dans la capacité des managers à faire travailler les hommes autrement, à croire en eux, en les débarrassant de ce qui favorise le cynisme et l’irresponsabilité ». François Dupuy, sociologue des organisations, auteur de Lost in Management.

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