Dans une interview au magazine L’Usine nouvelle, Françoise Gri (présidente de ManpowerGroup Europe du Sud et de Manpower France), décrypte les fluctuations de l’emploi en France et « exhorte les entreprises en quête de talents à miser aussi sur la capacité des candidats à apprendre et à s’adapter. »
Son analyse de l’évolution de l’emploi :
« Les recrutements dans l’intérim et en CDI ont été élevés fin 2010 et au premier semestre 2011, car on a beaucoup regarni les équipes après deux années de restriction.
La clé réside maintenant dans la décision des entreprises de continuer à investir sur des équipes pour aller plus loin. L’ambiance actuelle, ajoutée au fait que le recrutement est toujours vécu comme un risque en France, fait qu’il pèse une certaine incertitude sur les prochains mois. Une crise de confiance en septembre, alors que les entreprises préparent leur budget, peut affecter les projets de recrutement pour l’année suivante. »
Interrogée sur le paradoxe de la coexistence de difficultés de recrutement alors que le chômage est élevé, Françoise Gri estime que
« en France, le vrai problème du chômage se pose surtout aux jeunes sans qualification et aux chômeurs de longue durée, qui ont du mal à se reconnecter. […] Quant aux tensions, elles sont réelles. Une enquête mondiale que nous venons de mener montre que 61 % des entreprises les éprouvent. Deux phénomènes se conjuguent :
- d’abord les filières techniques d’ouvriers, de techniciens spécialisés, d’ingénieurs, ne sont pas assez nourries par l’appareil de formation, alors que des filières plus généralistes produisent trop de candidats.
- Ensuite, il y a un décalage entre les compétences et les conditions d’emploi demandées par les entreprises et les candidats. Les entreprises veulent des compétences immédiatement opérationnelles, pour intégrer une ligne de production, une équipe projet… Elles veulent être très réactives pour attraper la croissance du prochain trimestre. C’est la réalité économique, mais l’humain est plus complexe. »
Les entreprises détiennent la solution à ce décalage :
« Il faut qu’elles se réapproprient la gestion des compétences. Elles le font déjà en nouant des partenariats avec des écoles et des universités ou en investissant dans l’apprentissage, mais elles peuvent aller plus loin.
Il faut aussi qu’elles revoient la sélection et l’intégration des jeunes. Pour résoudre la question de l’employabilité, il faut regarder les personnes différemment. Le diplôme n’est pas la seule façon d’analyser le potentiel d’un individu. Il y a aussi la capacité à apprendre, à s’adapter. »