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Semaine de l’emploi #36 – Conférence sociale : décevante… et révolutionnaire

En ouverture de la « Grande » conférence sociale, le Président de la République avait fait des annonces. Il a appelé le gouvernement à décider « d’une nouvelle articulation entre la prime pour l’emploi et le RSA activité, pour favoriser autant que possible l’incitation à l’emploi », demandé que la négociation sur l’assurance chômage menée par les partenaires sociaux à l’automne soit l’occasion « de simplifier les mécanismes [et] de mettre en œuvre les droits rechargeables prévus par la loi de sécurisation de l’emploi », lancé l’idée d’« un contrat d’apprentissage avec engagement d’embauche » et fixé un objectif d’arriver à au moins 500 000 apprentis « dans les trois prochaines années » (contre 435000 aujourd’hui). La suite de ce nouveau rendez-vous du dialogue social en France n’a pas été aussi riche en termes d’annonces, les réactions n’ont pas manqué de le souligner.

Longue


Longue mais synthétisée : presque dès la fin de la Conférence sociale, le gouvernement a publié sa feuille de route, dressant pour chacune des six tables rondes des objectifs d’action prioritaires – et qui seront évalués d’ici à la prochaine conférence sociale, troisième du nom, de 2014.

Méthodique

Plus policé que d’autres, Laurent Berger (CFDT) regrette un « manque d’élan et d’effectivité », déplore l’absence de « réforme systémique » et en attend plus sur le « pilotage des politiques d’emploi dans les territoires ». Mais le leader syndical préfère « saluer les intentions » et relever des avancées sur le terrain de l’Europe sociale, citant la garantie jeunes qui se dessine ou la lutte contre le « dumping social ».

Manquée

« Occasion manquée »tranche le syndicat des cadres CFE-CGC – qui reconnaissait pourtant « avoir été entendu ». Du côté des observateurs Marc Landré (Le Figaro) et Jean-Charles Simon (Atlantico), même son de cloche : « tout ça pour ça ».

Redondante


L’état d’esprit de la blogueuse Mamzelle B est du même ordre : rien de nouveau sous les nuages, en somme. Elle concentre son analyse sur la réforme de la formation professionnelle, à laquelle le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a assigné deux objectifs :

[encadre]Cette réforme devra faire le lien avec les enjeux de formation initiale et d’orientation, précise Mamzelle B – la spécialiste Cécile Van de Velde (EHESS) préconise de voir formation initiale, formation continue et travail comme un seul et même ensemble. Elle devra également mettre en oeuvre le compte personnel de formation issu de la loi de sécurisation de l’emploi, qui entre en vigueur le 1er juillet 2013. Un document d’orientation va être transmis aux partenaires sociaux d’ici 10 jours, afin d’organiser une négociation quadripartite (Etat, régions, syndicats et patronat) dans des délais « compatibles » avec la présentation d’un projet de loi d’ici la fin de l’année.

Glissante

Déplorant le manque d’« annonces sonnantes et trébuchantes », et relayant les doutes exprimés par les partenaires sociaux à l’issue de cette « grand-messe »Libération juge que la conférence sociale « patine sur l’emploi ».

Frugale


Les Echos observent eux aussi un patronat et des syndicats qui « restent sur leur faim ». Devant la prudence du gouvernement sur « le financement de la protection sociale et le coût du travail », Laurence Parisot gardera un « goût amer » de son repas d’adieu…

Utile (mais pas trop)

La présidente du principal syndicat patronal reconnaît toutefois des « progrès » et des débats « utiles » ; elle met néanmoins en avant deux bémols : un « mensonge » entretenu sur les retraites et « pas d’avancées significatives » sur le sujet de la compétitivité – inséparable selon elle de toute politique pour l’emploi. Une orientation relayée par la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Paris, pour qui la conférence sociale aurait dû être une conférence sociale et économique.

 

Bizarre

« C’est un peu bizarre, je croyais que les conférences sociales, c’était pour lancer des chantiers à venir » : Jean-Christophe Sciberras, à la tête de l’ANDRH, et « facilitateur » de la table ronde consacrée à la qualité de vie au travail, regrette en ces termes que les négociations – qui n’ont pas abouti – aient déjà été lancés avant la conférence sociale.

Floue, floue, floue, floue

Floue, et pas qu’un peu : évoquant les prises de position des « déçus », Le Monde relève à quatre reprises le « flou » qu’entretiendrait le gouvernement. Signe de prudence, cet enchaînement de doubles-négations : « on ne part pas du principe que les partenaires sociaux ne seront pas capables de s’entendre ».

Polémique

Pas de grand clash mais un match de chiffres : les prévisions de l’Insee, tombées en pleine conférence, contredisent l’objectif répété et maintenu d’inverser – durablement – la courbe du chômage d’ici la fin de l’année. L’Opinion fait le point sur les calculs de l’Elysée : « 20 000 contrats d’avenir «oubliés» et 30 000 chômeurs en formation, cela peut suffire à déjouer les prévisions de l’Insee ».

Laïque

« On a enterré les guerres de religion », conclut plutôt Jean Pisani-Ferry, rapporteur de la table ronde consacrée aux filières et emplois de demain« On s’oppose sur les retraites, mais on est d’accord sur tout le reste », juge Jean-Luc Placet – représentant du MEDEF et président de la Fédération Syntec. Compétences transversales, rapprochement entreprises/universités, formations permettant de passer d’une branche à une autre : L’Usine nouvelle montre que le consensus est général, notamment autour de l’idée de « mieux anticiper les besoins en compétences des entreprises ». Reste une question, posée par un représentant du syndicat Force Ouvrière : « Est-ce vraiment aux entreprises de former, dans un territoire, pour leurs besoins ? »

Mythique

C’est en partie à cette question que l’exécutif s’est évertué à répondre. Annonce parmi les annonces, débat parmi les débats : la chasse aux « emplois non pourvus », lancée dimanche dernier puis en ouverture de la Conférence sociale par le Président de la République, alimente la chronique. Outre une rallonge budgétaire accordée au ministère du Travail, le Président a en effet annoncé un « enjeu de mobilisation à très court terme » « faire en sorte que 100 000 offres trouvent par tous moyens une réponse » dans l’année… mais les services du Premier ministre ont nuancé le chiffre dès hier, craignant qu’il ne soit impossible d’atteindre un tel objectif d’ici décembre :

Cela dit, l’orientation demeure, elle a été confirmée ce lundi matin par le ministre du Travail Michel Sapin.


Alors, ces emplois non pourvus et ces difficultés de recrutement, un « serpent de mer » ? Il n’y aurait « pas forcément de quoi en faire un combat politique de premier plan », juge Libération, évoquant la « proposition saugrenue » d’un François Hollande converti à un « mythe ». « C’est un mythe bien utile », reprend même en choeur L’Opinion dans son 18h, évoquant les difficultés à dénombrer ces emplois non pourvus… tout en expliquant l’ampleur du phénomène par la faible attractivité d’une grande part d’entre eux et par des « problèmes de formation ».

Révolutionnaire


Au-delà de la bataille de chiffres, le gouvernement a justement insisté sur cette dimension en annonçant la mise en oeuvre d’un « plan de formations prioritaires pour l’emploi » : un dispositif qui sera opérationnel en septembre et qui commencera en juillet par « recenser les besoins, par région et par secteur, préciser les outils utilisables immédiatement et mobiliser les financements ».

PenBreizh_Identifier-Former-AccompagnerEn réalité, les mécanismes qui font coexister aujourd’hui chômage de masse et difficultés de recrutement sont complexes, tous les acteurs ont leur part de responsabilité. Pour sortir de ce paradoxe choquant, il faut une action déterminée, structurelle et partenariale. Des initiatives émergent et fonctionnent, comme le Pacte Pen Breizh qui, en Bretagne, associe tous les acteurs pour soutenir à la fois la compétitivité des entreprises et l’emploi – en passant par l’attractivité des territoires ; manifestement, la philosophie qui préside à ces actions de terrain inspire le gouvernement.

Derrière la déception, cette conférence sociale deuxième du nom a été l’occasion de confirmer que deux révolutions, moins perceptibles, sont en train de renouveler profondément la philosophie des politiques de l’emploi. Les contours du « plan de formation prioritaires » annoncé en sont la preuve.

Révolution 1 – Partir de la demande

En demandant aux entreprises de « mouiller la chemise », la démarche dénote une nouvelle volonté de partir de la demande de travail (ou « offre d’emploi »), celle des employeurs. Pour résoudre la « grande inadéquation » des compétences, les entreprises seront invitées, début juillet, à faire connaître leurs besoins, urgents ou de long terme. C’est sur cette base que se programmeront les 30 000 entrées supplémentaires en formation annoncées d’ici à la fin de l’année.

Précisions de Michel Sapin, ce matin sur RMC :

Michel Sapin
© BFMTV

« Au mois de juillet, nous allons faire un recensement et, à ces vrais emplois vacants, nous allons essayer de trouver un chômeur qui a envie de travailler. Mais il faut aux chômeurs des formations. Nous allons créer 30 000 formations. Ces formations ne seront pas comptabilisées dans les chiffres du chômage. Cela devrait coûter 150 millions d’euros. »

La nécessité de l’anticipation couplée à une réponse immédiate : c’est une priorité nette qui se dégage de l’ensemble des tables rondes, analyse la Gazette des communes.

Révolution 2 – Le centralisme est mort, vive les territoires !

Emploi et travail : caractéristiques des territoires
Territoires et emploi : carte de France

L’autre point qui marque, dans ce plan d’urgence, c’est la volonté d’agir  au plus près des réalités économiques, à l’échelle des territoires et bassins d’emploi. Dès le 2 juillet, les préfets devraient être réunis pour coordonner ce grand recensement « très territorialisé » des besoins et « opportunités d’emploi », en mobilisant aux niveaux locaux les branches professionnelles, Pôle emploi, les régions et les services déconcentrés de l’État. Priorités : les offres d’emploi non pourvues en raison de compétences inadaptées, et une mobilisation des dispositifs existants.

Si l’Actualité de la formation observe une unanimité autour du « projet gouvernemental d’améliorer l’offre de formation existante en vue de son adaptation aux métiers de demain », c’est surtout en raison de l’accent mis sur « l’importance des territoires comme échelon de recensement des besoins, métiers, compétences et filières ». Les départements appellent, quant à eux, dans leur mission d’insertion professionnelle, à davantage de complémentarité avec « les mesures d’accompagnement de Pôle emploi ».

A suivre…

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> Crédit image : scottroberts
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