Face à l’entreprise en constante mutation, le leader doit-il se repenser ? Défi stratégique pour les sociétés, la mutation numérique bouleverse les façons de travailler mais aussi de manager. A quoi ressemblent les leaders du XXIème siècle ?
Si l’entreprise se transforme, les leaders aussi. D’ici 2030, 40 % des métiers actuels pourraient avoir disparu avec le digital et l’automatisation. La transformation des entreprises met les dirigeants au défi de s’adapter à des réalités incertaines, complexes et ambiguës. Comment manager, mener l’organisation de façon efficace quand la transformation n’est plus un événement ponctuel, mais semble devenir une réalité pérenne ?
Quels nouveaux modèles de leadership proposer ? Quelles actions concrètes pour que ces modèles deviennent des leviers de croissance pour l’entreprise ? Autant de thématiques sur lesquelles ont débattu les intervenants à la table ronde « Le leader du 21ème siècle et la transformation dans les entreprises » organisée par Right Management lors du forum Global RH 2016, en présence des DRH de Google, Sanofi et du groupe FDJ.
Voici 7 conseils de leadership tirés de cette table ronde.
1 – Redéfinir le leadership, oui, mais ne pas figer la définition !
54% des entreprises ne sont pas satisfaites de leurs programmes d’identification des talents et de leadership, selon l’enquête Manpower Human Age 2.0. La raison de cette insatisfaction d’après Jacques Quinio, Principal Consultant chez Right Management : trop de temps passé à définir les modalités, les programmes, et trop peu à définir le modèle de leadership souhaité :
« Il y a un paradoxe à penser qu’il y a un modèle de leadership, unique et figé, qui va pouvoir asseoir la transformation. Au contraire, il ne faut pas chercher à le définir de manière trop précise ».
Définir des compétences de leadership permet aux leaders d’accompagner les transformations en cours, et d’aligner valeurs, vision stratégique et mesure de la performance.
Mais cette définition reste contextuelle et mouvante dans un environnement volatile, incertain, complexe et ambigu qui représente un vrai défi pour les leaders. Le management de la complexité est ainsi promu dans les programmes de développement du leadership de Google, souligne David Yana, DRH France de l’entreprise américaine.
2 – Favoriser un leadership plus horizontal
Un manager, oui, un chef, non ? L’ensemble des participants s’accorde à dire que les leaders doivent également faire face à une transformation de l’autorité, notamment avec l’arrivée sur le marché du travail des générations Y et Z.
Pour s’imposer, le leader tire maintenant l’essentiel de son autorité de ses compétences, ce qui favorise l’apparition d’un leadership plus « horizontal ». Chez Google nous explique David Yana, les décisions sont très souvent prises de manière collective, l’écoute et le feedback des collaborateurs sont deux points centraux. Une évaluation des compétences du management est menée chaque année, celle-ci est déterminante dans l’évolution de carrière des managers. Ce qui les incite à être à l’écoute de leurs équipes, et à susciter l’adhésion pour faire avancer leurs projets.
Un bon leader est ainsi celui qui sait écouter ses collaborateurs, animer les séances de travail et emporter l’adhésion.
3 – Intégrer ces nouveaux modèles de leadership de manière systémique
Il ne sert à rien de redéfinir les compétences de leadership, si ces dernières ne sont reconnues par tout le système de l’entreprise, et encouragées !
Chez Sanofi, présent à l’événement Global RH, cette intégration est pensée à l’échelle de l’entreprise. Les guides d’entretiens pour les recrutements internes et externes sont par exemple revus pour être alignés avec les compétences de leadership. Ces compétences sont également intégrées dans le système de bonus et dans les development centers. Cette cohérence donne davantage de poids à la stratégie de leadership de l’entreprise, et renforce son image de marque employeur.
Chez FDJ, cette intégration systémique se traduit jusque dans les programmes de formation : « A chaque fois qu’il y a un mouvement de réorganisation, nous formons les membres du groupe si besoin, et nous coachons systématiquement l’organisation. Nous travaillons sur le leadership des organisations et pas seulement des individus. », affirme Jean-Christophe Buvat, Directeur de la Transformation du groupe FDJ.
4 – Encourager la prise de risque… et donner le droit à l’erreur !
Dans un monde en pleine transformation, il faut savoir saisir les opportunités dès qu’elles se présentent. Les leaders doivent savoir les identifier et agir pour en tirer parti. Ils doivent prendre des risques, admettre leurs erreurs et être des modèles pour les collaborateurs.
« Oser diriger », c’est la façon dont Corinne Fromentin, Directrice du Pôle Conseils et Projets chez Right Management, a baptisé ce nouveau style de leadership. Une capacité qui implique de challenger l’autorité de façon constructive, d’avoir confiance en soi et de savoir changer son approche si nécessaire.
Chez Google, cette capacité à prendre des risques et le droit à l’erreur qui en découle, sont inscrits dans la culture d’entreprise. Point capital : des objectifs non-financiers sont fixés pour chaque collaborateur, à tous les niveaux. Régulièrement, les collaborateurs communiquent sur ces objectifs, remplis ou non. Ce partage a des conséquences positives pour l’organisation, comme l’explique David Yana :
« A partir du moment où vos leaders admettent l’échec et l’erreur, tout le monde dans l’entreprise en est capable – et de prendre des risques. C’est une question de survie, car il n’y a pas d’innovation sans prise de risque. »
5 – Favoriser l’engagement des collaborateurs
68% des managers ne sont pas impliqués dans la carrière de leurs collaborateurs d’après l’étude Human Age 2.0 de ManpowerGroup. Pour Corinne Fromentin, Right Management, le meilleur moyen de remédier à cette situation est de faire des leaders de véritables coachs de leurs collaborateurs :
« Le leader est celui qui donne du sens à la carrière d’une personne, qui va l’aider à trouver du sens grâce à une posture de coach. »
Les bénéfices de cette posture de coaching sont nombreux : si chaque leader donne un sens personnel à son action, il en sera de même des collaborateurs : « Plus vous proposez de la souplesse aux collaborateurs, plus ils prennent des responsabilités et plus ils sont productifs. » Une attitude essentielle pour gérer les nouvelles générations qui souhaitent être jugées sur leurs résultats, et non sur le présentéisme.
6 – Une redéfinition du leadership qui doit venir du top management (et être accompagnée par les RH)
La définition du leadership n’est pas seulement un sujet RH, c’est un sujet Business avant tout. D’un côté les opérationnels s’emparent de ces sujets, de l’autre, les RH sont là pour les accompagner dans le processus. Pour Corinne Fromentin, Right Management :
« Il y a une responsabilité organisationnelle à aider les leaders à co-construire et anticiper les modalités de travail de leurs collaborateurs »
Chez FDJ, par exemple, la transformation des modes de fonctionnement relève d’un choix de la DG, non des RH. L’exemple est venu du top management également : une enquête interne sur la maturité managériale a été menée, en commençant… par les membres du COMEX.
7 – Sécuriser les parcours des leaders, un vrai levier de performance
Les organisations qui ont la capacité de gérer les carrières de leurs collaborateurs sont « deux fois plus productives, et leurs employés sont jusqu’à six fois plus engagés », selon Corinne Fromentin, Right Management. Et cela se répercute aussi chez les clients, plus facilement fidélisés car l’entreprise peut leur promettre les meilleures compétences de la part des managers :
« Intégrer à la culture d’entreprise, la dynamique de carrière est un vrai levier de performance »
Cette agilité des leaders, doit également être pensée en termes de développement horizontal, et plus seulement vertical : il est ainsi nécessaire que ceux-ci pensent leur carrière en termes de changement de métier au sein même de leur entreprise. Aujourd’hui, devenir le leader de demain c’est être capable de faire naitre ces synergies internes, de générer de l’enthousiasme, de la curiosité et de l’engagement de la part de ses collaborateurs en les faisant gagner en autonomie et en agilité. En d’autres termes, faire du manager un véritable catalyseur de l’innovation collective.