A l’invitation du site Jobsféric.fr, Carole Couvert, présidente confédérale CFE-CGC, Sébastien Van Dyk, Directeur Général Stratégies et Opérations RH de ManpowerGroup Solutions et Nicolas Rolland, directeur innovation et culture chez AXA, ont débattu ensemble des nouveaux enjeux auxquels sont confrontées les RH dans la transformation digitale des organisations. Une transformation, qui va de pair avec la mutation de la fonction et des métiers RH. Nous reproduisons ici les principaux points de cette table ronde.
Ce billet est la suite de Transformation digitale et RH (1/2) : comment co-construire la co-responsabilité ?
Penser (et réaliser) l'entreprise hybride
"Les entreprises traditionnelles ne doivent pas forcément ressembler aux entreprises issues du digital !" L'affirmation de Sébastien Van Dyk (ManpowerGroup Solutions) peut surprendre.
Et pourtant : à trop vouloir copier les entreprises nées par le numérique, les entreprises traditionnelles pourraient bien y perdre leur âme. Et échouer a véritablement réussir la transformation digitale. Pour Sébastien Van Dyk, "Il faut que ces entreprises s'inspirent des best practices [des Google, Amazon et autres], qu'elles deviennent des entreprises hybrides".
Selon lui, trois axes de travail, à la portée de toutes les entreprises, peu importe leur taille et leur rapport au numérique, sont identifiées :
- Le premier réside, assez logiquement, dans "le partage de l'information et dans la transparence des informations diffusées et infusées" ;
- Le second, dans la "maîtrise totale de la fracture digitale, qui passe notamment par l'identification de ce que les seniors peuvent apporter aux nouvelles générations et par le reverse mentoring" ;
- Enfin, le troisième axe se définit notamment en termes de "pilotage de ce passage de la tradition vers l'innovation, entre une culture d'entreprise historique et une nouvelle culture entrante. Il faut que les collaborateurs comprennent qu'ils font le même métier, mais différemment".
Cette imbrication d'anciens et de nouveaux modèles place, de fait, les RH dans une situation de pilotes. Pour Sébastien Van Dyk, "La RH doit alors s'assurer que toutes les fonctions sont coordonnées et embarquées de la même façon dans une même vision, au même moment et de manière pérenne afin que cela devienne un véritable process".
Anticiper les nouveaux métiers et les besoins en compétences
Charge aux RH, ensuite, de s'adapter aux nouveaux besoins de l'entreprise et de travailler sur les enjeux d'engagement des collaborateurs. "AXA a développé les compétences en relation-client grâce à un serious game pour mettre les collaborateurs en situation. Cela a permis de créer un consensus autour de certaines valeurs et compétences", note par exemple Nicolas Rolland (AXA).
Au-delà de l'accompagnement, "la RH a un rôle d'anticipation, en fonction des intentions stratégiques de l'entreprise", en particulier sur la question des besoins en compétences. Carole Couvert (CFE-CGC) estime que la RH doit "accompagner les talents dans les changements de passerelles". Pour que les passerelles soient possibles, les RH doivent envisager l'entreprise comme "un écosytème" dans une "logique d'épanouissement collectif permettant d'attirer et d'engager les talents".
Dans ce cadre, "le digital peut libérer les potentiels de l'entreprise", explique Carole Couvert. Cela passe notamment par le développement du "télétravail, de la visioconférence, des plateformes collaboratives, mais aussi par l'organisation des mobilité dans un même bassin d'emploi et de l'entrepreunariat infra-entreprise". Nicolas Rolland imagine à son tour "l'intrapreunariat" comme "des espaces de créativité où mettre à disposition des compétences, des savoir-faire et des inspirations".
La transformation digitale est aussi une transformation RH
Derrière ces fonctions de pilote et d'anticipation, c'est aussi le métier des RH qui évolue : "la fonction RH se transforme pour mener à bien ses ambitions et prendre en compte l'impact du digital sur la fonction elle-même", constate Sébastien Van Dyk. "L'évolution des compétences, l'ingénierie sociale afin de développer la cohésion sociale, ainsi que tous les autres aspects RH, comme l'évaluation, sont à repenser", poursuit-il.
Le recrutement, par exemple, est devenu crosscanal : en plus de job boards, les recruteurs utilisent de plus en plus les réseaux sociaux traditionnels ou passent par des réseaux sociaux dédiés pour diffuser les offres d'emplois ou communiquer sur l'entreprise. Cette présence sur le web est également un atout en terme de marque employeur pour attirer les talents. Le marketing RH, une fonction encore trop souvent sous-employée, doit alors jouer un rôle de "diffusion des actions menées vers les collaborateurs mais aussi de définition d'une marque employeur responsable".
Enfin, l'essor du big data permet de mesurer la performance économique des RH. "Côté RH, nous avons beaucoup de données. Encore faut-il savoir comment les traiter et comment s'en servir pour donner des indicateurs pertinents et fiables" assure Sébastien Van Dyk. "Le ROI [retour sur investissement] est primordial et permet de montrer que chaque champs de l'entreprise va dans le sens de la vision" poursuit-il. Le DRH a de plus en plus une fonction financière : "son vrai combat consiste à recalculer et fiabiliser les obligations RH. C'est un calcul d'actuaire qui doit s'opérer entre la vision, l'écosystème, la population et les compétences pour avoir une dynamique et un pilotage", conclut-il.
Retrouver l’intégralité de cette table ronde Jobsféric en vidéo :