ÉVÈNEMENT. La France a des choses à dire, à faire, à créer ! Jeudi 8 octobre, la Fondation ManpowerGroup célèbre « La France Qui Vient ». Eduquer, entreprendre, connecter, innover… Six grands thèmes seront traités lors de cette journée exceptionnelle. L'Atelier de l'Emploi vous en donne un avant-goût.
A l'occasion de "La France Qui Vient", de nombreuses personnalités issues du monde de l'entreprise, de la sphère associative et du monde artistique échangeront et débattront autour de six thématiques-clés : éduquer, entreprendre, créer, connecter, innover et vivre ensemble.
Pour le quatrième thème de cette journée "Connecter", les intervenants s'interrogeront sur ce qui nous nous réunit, et sur les façons dont le digital créé sans cesse, dans cette France qui se dessine, de nouvelles connexions ? Car des ruptures subsistent : la France de demain est-elle vraiment comprise par les élites d'aujourd'hui ? Comment se connecter aux nouvelles générations ? Quels moyens pour rassembler ceux qui ont envie d'agir ? État des lieux avec les invités de la #FranceQuiVient.
N'hésitez pas à réagir dès maintenant sur les réseaux sociaux avec le hashtag #FranceQuiVient et à vous inscrire à l'évènement !
Alexandre Jardin : "A un moment où la parole politique est décrédibilisée, il est nécessaire que d'autres acteurs passent à l'action"
Ecrivain, cinéaste et pamphlétaire @AlexandreJardin
C'est avec Le Zèbre qu'Alexandre Jardin s'est fait connaître du grand public. Près de 15 ans après la publication du roman, l'écrivain fondait l'association et mouvement citoyen Bleu Blanc Zèbre pour "fédérer la société civile dans une action concrète au bénéfice de la population". En 2015, il publie également Laissez-nous faire ! On a déjà commencé, un manifeste pour une société civile solidaire, déterminée à agir face au discrédit des partis politiques.
"Le pays est en train d’inventer toutes les solutions dont il a besoin, grâce à ses maires, ses associations, ses entrepreneurs." Alexandre Jardin est convaincu de la créativité et de la capacité d'action de ceux qu'il appelle les "faizeux" (par opposition aux "diseux").
Opposé aux mesures technocratiques et déçus des politiciens, il appelle au sursaut citoyen. Comment ? Grâce à son do thank bleublanczèbre.fr et à ses bouquets d'actions citoyennes. Enthousiaste, ce partisan de la "révolution positive" appelle également ses Zèbres à s'engager dans des programmes comme Jobbers, l'Uber des services à la personne, Yooneed, un site qui aide les indépendants à se faire connaître grâce à une présentation vidéo, ou Bulb in Town, une plateforme de crowdfunding destinée aux projets locaux…
Jean Deydier : "Faire de la force du numérique un levier d'insertion sociale"
Directeur de l'association Emmaüs Connect @EmmausConnect
Avant de s'engager au sein du mouvement Emmaüs, Jean Deydier était directeur commercial de SAP, un spécialiste des logiciels de gestion. A partir de 2007, il a présidé l'association Emmaüs Défi, un laboratoire d'innovations sociales puis a créé en 2013 le projet Emmaüs Connect. Mission ? Réduire la fracture digitale en donnant accès à la téléphonie mobile et à Internet aux personnes en situation d'exclusion. L'association travaille également à l'inclusion numérique en formant les jeunes en rupture aux technologies numériques.
Comment répondre à une annonce d'emploi en ligne ou remplir un dossier de demande d'allocations dématérialisée quand on ne maîtrise pas l'usage du numérique ? Chaque année, 140 000 jeunes décrochent du système scolaire, rejoignant les 2 millions de NEET (Not in Education, Employement or Training). Or, contrairement aux idées reçues, tous ne sont pas des digital natives. Alors qu'une étude réalisée par Emmaüs Connect montre que plus de 9 jeunes interrogés sur 10 ont, d'une manière ou d'une autre, accès à Internet, la question de leur agilité numérique se pose. En effet, tous ne possèdent pas les compétences qui leur permettraient d'utiliser les outils numériques à bon escient dans le cadre d'un parcours d'insertion professionnelle.
En partenariat avec les missions locales, Emmaüs Connect a imaginé Connect Emploi, une plateforme qui s'adresse en priorité aux jeunes peu qualifié en décrochage scolaire. Encore en chantier, elle proposera bientôt des ressources et outils pédagogiques ainsi que des modules e-learning permettant l'acquisition de compétences numériques. Et Jean Deydier ne compte pas s'arrêter là !
Laure Belot : "Les élites ne veulent pas laisser passer la vague numérique mais elles ont du mal à comprendre ce qu'il se passe"
Journaliste au Monde et auteure @curieusedetout
Diplômée de l'ESSEC et ingénieure en chimie, Laure Belot a fait du conseil en stratégie avant de rejoindre le journal Le Monde, où elle enquête sur les phénomènes sociaux émergents. Dans son ouvrage La déconnexion des élites, elle décrypte la façon dont le numérique a bousculé la société, laissant de côté des intellectuels, politiques, chefs d'entreprise ou banquiers dépassés.
"Les élites débordées par le numérique" titrait Laure Belot en 2013 dans les colonnes du Monde. Des classes dirigeantes incapables d'appréhender la lame de fond sociétale qu'est la révolution numérique, c'est ainsi que la journaliste décrit nos "élites déconnectées". Pour elle, la révolution Internet répond à un schéma déjà bien établi : naissance d'une idée en marge de la société, appropriation des innovations par les acteurs privés, apparition de conflit et réaction (tardive) des pouvoirs en place pour cadrer les débordements… Laure Belot expose ainsi les clivages et difficultés causés par le tsunami numérique.
Si l'auteure distingue les jeunes générations, nées avec la vague numérique, de ceux qui ont du mal à percevoir l'accélération et la transversalité d'une société toujours plus digitale, elle pointe néanmoins des élites 2.0, capables de prendre des positions importantes sur cette nouvelle économie et de remettre en question les vieux modèles.
Pascal Picq : "Quelles seront les formes de sociabilisation de demain, quand les machines feront quasiment tout le travail ?"
Paléoanthropologue au Collège de France @pascalpicq
Un paléoanthropologue en entreprise ? C'est ainsi que Pascal Picq aime à se décrire. Responsable de l'unité de paléoanthropologie et d'anatomie fonctionnelle (UPAF) du Collège de France, Pascal Picq intervient depuis une quinzaine d'année dans le secteur de l'entreprise. Il est notamment l'auteur de L'entreprise impertinente est celle capable d'évoluer et d'Un Paléoanthropologue dans l'entreprise : s'adapter et innover pour survivre dans lequel il dénonce un "management lamarckien" autoritariste et lui préfère un darwinisme qui écarterait les modèles et pratiques "aux effets délétères pour l'économie et l'ensemble de la société".
"Si nous déléguons aux machines les traits cognitifs et physiques qui font de nous des hommes, nous deviendrons des esclaves de ces machines." Pour le paléoanthropologue, conformément au paradoxe de Moravec, qui veut que les machines soient plus à même d'effectuer des tâches nécessitant un raisonnement de haut niveau, les emplois les plus qualifiés sont les plus menacés à court terme. Les solutions proposées par les politiques ? Pascal Picq les considère comme déjà caduques et remet en question un modèle social basé sur la sociabilisation par le travail.
Pour cet ardent partisan du darwinisme, la clé de l'évolution est dans la diversité et il est essentiel de revoir certains "archaïsmes managériaux" pour dépasser les clichés et encourager l'élan adaptatif. Il dénonce notamment le principe d'homogamie appliqué à l'univers professionnel, c'est-à-dire le fait de recruter des collaborateurs aux profils décalqués sur ceux de leurs prédécesseurs, pour prôner la variation et la création de diversité et de singularité dans une équipe.
Crédits photos : Wikimedia / Licence CC-BY-SA-3.0 ; Portrait de Laure Belot © Quintin Leeds ; xflickrx / CC BY-SA 2.0