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Pour en finir avec les clichés sur les générations Y et Z : l’interview de Jean Giboudeaux

Le Directeur Général de Right Management s’est confié au magazine « Management » aux cotés de Marianne Gosset, co-fondatrice du média « The Socialite Family ». Regards croisés sur la place des jeunes dans les entreprises et sur le marché du travail. Retrouvez l’intégralité de l’article paru dans « Management » le 1er mai dernier, et les deux volets de l’étude mondiale de ManpowerGroup :  « La Génération Y au travail – Une carrière pour moi » et « Génération Y et Carrières  – Vision à l’horizon 2020 ».

Manager les moins de 30 ans demande des qualités d'écoute et d'adaptation. Cela admis, confient ces deux dirigeants, travailler avec eux peut être très plaisant. Propos recueillis par Sébastien Pierrot.

Marianne Gosset a lancé The Socialite Family, un site spécialisé dans la décoration et le design. Et si cette jeune pousse en plein développement a déjà recruté huit collaborateurs, seules les deux dirigeantes ont atteint la trentaine. Pour sa part, Jean Giboudeaux dirige Right Management, la marque de ManpowerGroup qui aide les grands groupes à piloter leurs ressources humaines et, notamment, à intégrer les jeunes. Tous deux ont donc une vision très précise de la place des fameuses générations Y et Z dans les entreprises et sur le marché du travail. Mais aussi des nombreux fantasmes qu'elles suscitent…

Comment qualifieriez-vous la génération Z ? 

MARIANNE GOSSET : D’énormes clichés sont associés à cette génération, qu’on commence à voir arriver sur le marché du travail. Elle serait composée d'employés infidèles, « court termistes », ne supportant pas la hiérarchie et zappant d'un poste à l'autre. Certaines choses sont vraies, parce que les « Z » ont grandi avec Internet et les réseaux sociaux, mais on les caricature souvent en ne voyant que leurs mauvais côtés.  

JEAN GIBOUDEAUX : Il ne faut pas généraliser. La génération Z représente 16 millions de personnes en France. Or, quand on parle de ceux qui travaillent déjà, on pense à des urbains, proches de l'écosystème des start-up. On ne regarde que la petite part citadine et parisienne de la jeunesse. Mais au fin fond des régions, elle ne ressemble pas à cela.

A quoi ressemble-t-elle alors ?

M.G. : Elle est ultrapositive et optimiste. Elle défend de vraies valeurs et recèle une grande richesse. Les jeunes qui arrivent sur le marché du travail sont polyvalents, très curieux. Ils recherchent des postes ou des entreprises qui leur donneront l'occasion de développer plusieurs compétences. Ils aiment le travail quand il les passionne et qu'il a du sens pour eux. Lorsqu'on a compris cela, travailler avec eux se révèle très agréable.

J. G. : Les générations Y et Z nous poussent à tester des choses. Chez Right Management, par exemple, c'est un garçon, arrivé il y a trois ans, qui nous a suggéré de mettre en place l'évaluation des collaborateurs à distance par vidéo. Toutes les idées liées au numérique nous sont soufflées par ces jeunes.  

D'où provient le malentendu ? 

J. G. : On dit aujourd'hui de ces nouveaux venus sur le marché du travail ce qu'on a dit de la génération Y et, avant elle, de la génération X : qu'ils veulent comprendre pour quoi ils bossent. Mais, nous aussi, nous cherchions du sens : on avait envie de travailler  dans l'humanitaire, par exemple. De chaque nouvelle classe d'âge, on dit qu'elle va tout révolutionner : mais celle d'il y a trente ans était déjà porteuse d'innovation et de dynamisme.

Comment réagissent les entreprises ?

M.G. : Elles créent des open spaces, installent des baby-foot, font du coworking…

J. G. : C'est bien, mais c'est surtout du décor, ça n'est pas suffisant. Les sociétés doivent partir du principe que les jeunes vont effectuer dix ou quinze jobs au cours de leur vie professionnelle et qu'ils le savent. Il est normal de s'attendre à une certaine infidélité de leur part. Les boîtes doivent donc soigner le départ de ces collaborateurs. Et inventer pour eux des carrières beaucoup plus courtes. Aujourd'hui, la perspective de passer dix ans dans le même groupe ne fait plus vibrer. Pourtant, les entreprises ont besoin de faire place à la jeunesse si elles veulent réussir leur transformation. Sinon, elles risquent d'être remplacées par des start-up d'ici à quinze ans. 

M. G. : Chez The Socialite Family, ça nous ennuie de savoir que nos collaboratrices ne vont rester que deux ou trois ans. Nous leur sommes attachées, parce qu'elles sont douées et que nous avons passé du temps à les former. Mais nous sommes conscientes que ces jeunes femmes doivent construire leur carrière par étapes. Nous faisons le maximum pour que nos recrues se sentent bien chez The Socialite Family, tout en sachant qu'elles ne resteront pas dix ans.

Comment les managez-vous ?

M. G. : Les jeunes ont besoin de participer à la vie de leur entreprise et de donner leur avis. Pour notre part, nous faisons beaucoup de brainstorming, nous organisons des réunions où nous leur laissons la parole. Cela signifie que nos employées ne vont pas toujours être d'accord avec nos idées. En tant que patron, il vaut mieux l'accepter et admettre qu'on s'est peut-être planté plutôt que de partir du principe que ce sont elles qui ont tort. C'est nouveau et assez compliqué à faire. Pour le reste, nous les incitons à mener leurs projets de A à Z. Cette génération aime tenter et elle ne craint pas de faire des erreurs. Quand ça fonctionne,  c'est génial. Et en cas d'échec, on cherche ensemble ce qui a raté et ce qui peut être amélioré. Car nous ne leur retirons pas notre confiance pour autant.  

Est-ce qu'ils vous remettent en cause ?

J. G. : Bien sûr. Les moins de 30 ans n'hésitent pas à pousser la porte de mon bureau et à me bousculer, parfois sans y mettre les formes : je suis nul, je n'ai rien compris, etc. Ça surprend ! Certes, ils râlent, mais toujours dans une optique constructive. Ils sont tellement engagés qu'ils ne supportent pas quand les choses ne vont pas assez vite.

M. G. : Cela dit, ils ne remettent pas en question l'autorité. Si on leur montre qu'on est légitime et qu'on est transparent sur les objectifs, ils suivent sans renâcler.

On entend aussi dire que ces jeunes ne s'intéressent pas à l'argent…

M. G. : Oui, je l’ai lu, mais je crois que c'est faux. Ils ne sont pas du tout désintéressés.

J. G. : Le premier élément pour attirer des jeunes dans une entreprise demeure le salaire. Il constitue même l'attrait principal pour 39% d'entre eux, selon une étude de BNP-Paribas. Après viennent les possibilités de voyager, le plaisir, l'acquisition de savoirs, la variété des tâches… Ils sont comme tout le monde : ils ont besoin d'argent.

La génération Y au travail : 2ème volet de l’Etude mondiale de ManpowerGroup

La génération Y au travail : 1er volet de l’Etude internationale de ManpowerGroup

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