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Le bruit des arbres qui poussent. 1 – Numérique et emploi, le grand malentendu

« En France, quand un politique parle de numérique, les gens craignent des suppressions d’emplois ; alors il n’en parle pas, sinon, il n’est pas réélu. » Guy Mamou-Mani, président du Syntec numérique, explique par cette formule les motivations des acteurs de l’ébullition de la semaine dernière : Assises du numérique, Big Tent de Google, débats participatifs et 19 propositions du think tank Renaissance numérique pour sortir de la crise… Le secteur s’est mis en ordre de bataille pour faire entendre sa voix et dépasser les non-dits du débat public. Miser sur le numérique serait une stratégie gagnant-gagnant, qui enclencherait un cercle vertueux de croissance et d’emploi.

Les entreprises du secteur des nouvelles technologies sont celles qui ont la meilleure image auprès des Français… mais la grande  majorité d’entre eux considère qu’elles sont secondaires pour la croissance et l’emploi. « La logique serait de soutenir les secteurs qui vont mal au détriment de ceux qui vont bien » : Bruno Vanryb, président du Collège Editeurs du Syntec Numérique, résume un paradoxe du débat public et le grand malentendu qui règne sur le rôle du numérique dans la croissance et l’emploi. Les Français s’attacheraient-ils plus aux drames qu’aux belles histoires ? Dans la bataille de la compétitivité et de l’emploi, devons-nous plutôt défendre ou attaquer ? Les incertitudes de l’avenir nous angoissent-elles trop pour que nous ayons confiance dans le processus de « destruction créatrice » porté par les innovations technologiques ?

Seulement 5% des Français considèrent que les télécoms et l'informatique sont une priorité pour la croissance et l'emploi

Une croissance vertigineuse

« Croissance : une révolution numérique, sinon rien » : lundi dernier, le mot d’ordre de la Big Tent de Google était clair. Pour Jean-Paul Delevoye, président du Conseil économique, social et environnemental, il s’agit de  faire enfin entendre « le bruit des arbres qui poussent ». La métaphore marque, notamment Willy Braun, délégué général de l’association France Digitale.

Criteo

Le numérique est l’un des secteurs qui résiste le mieux à la crise, l’OCDE, l’a prouvé. Il contribue de plus en plus à la croissance économique, via le e-commerce et la publicité en ligne notamment, et il booste l’entrepreneuriat. La France peut se vanter de son « collier de perles », composé notamment de Criteo, spécialiste de l’achat d’espaces publicitaires sur Internet, dont la croissance a dépassé 200.000% en 5 ans ! Parmi les entreprises françaises spécialisées dans les nouvelles technologies mises à l’honneur lors des Deloitte Technology Fast 50, dix-neuf connaissent une croissance supérieure à 1000%…

Digitalisation = performance. Dans tous les secteurs.

Miser sur ces activités florissantes signifie-t-il abandonner l’industrie ? Bien au contraire : le numérique, c’est « à la fois l’industrie du futur et le futur de l’industrie », avance le Syntec. Louis Gallois le reconnaît« c’est une clé pour l’industrie française ». CapGemini a en effet montré que, quelle que soit leur activité, les « digital leaders » – ces entreprises ayant pris le virage numérique – sont plus performantes que la moyenne de leur secteur à hauteur de 26%. Dans l’industrie, les entreprises les plus en pointe mettent en place des programmes de développement des « compétences digitales ».

France Digitale - La grande entreprise la plus dynamique de France

Une croissance sans emplois?

La technologie porte la croissance, c’est indéniable. Et l’emploi ? Depuis 1995, le secteur Internet serait à l’origine de plus d’un quart des créations nettes d’emploi. A terme, les machines vont-elles remplacer l’homme et nous mettre tous au chômage ? « Dans toutes les industries, la digitalisation […] détruit des activités très rémunératrices, mais en génère de nouvelles prometteuses », explique Thibault de Jaegher, directeur de la rédaction de l’Usine nouvelle.

CloudGuy Mamou-Mani affiche sa confiance dans l’avenir : « Il est normal que chaque révolution industrielle s’accompagne de destruction d’emplois, mais c’est sur du court terme. Sur la distance, le numérique créera dix fois plus de postes qu’il n’en aura détruits ». En somme, il faudrait changer notre regard. Au lieu d’une compétition entre l’emploi et la technologie, les deux feraient équipe : « From Race Against the Machine to Race With the Machine »

« Tout se transforme… » : l’exemple du cloud

Avec les nouvelles technologies, l’emploi ne se perd pas, il se transforme. Quand des activités disparaissent, de nouveaux métiers apparaissent. L’avènement du cloud computing illustre bien ce processus de « destruction créatrice ». Le cloud, c’est l’externalisation du stockage de ressources informatiques sur Internet, dans le « nuage » (ou, plus prosaïquement, dans des datacenters géants). En mutualisant et en automatisant un grand nombre de tâches d’installation, d’industrialisation et d’exploitation, il permet de développer des solutions logicielles en un temps record, comme par exemple la configuration et la mise à disposition d’un service de messagerie pour des milliers de personnes. Naturellement, le cloud permet de faire plus avec moins de ressources humaines dédiées à la gestion des données. Mais si l’on en croit les projections d’IDC/Microsoft, cette technologie permettrait la création de près de 190 000 emplois en France d’ici 2015 !

Cloud et activité informatiqueAu lieu de supprimer des emplois dans les DSI,  le cloud renforcerait plutôt leur rôle en les amenant à innover pour développer de nouveaux services, donc de nouvelles compétences. Naîtraient alors de nouveaux métiers, comme ceux de cloud broker, (intermédiaire entre le client et les fournisseurs), de cloud auditor (qui contrôle le respect des clauses contractuelles et les prérequis en matière de sécurité ou de localisation des donnés), ou encore de cloud architect (qui accompagne les entreprises dans leur transition vers le cloud). On assisterait donc à une mutation : la « logique servicielle » irrigue toutes les activités, les services prennent le pas sur la technique « pure ». Une évolution d’ailleurs déjà à l’oeuvre au sein des DSI

La France a de nombreux atouts pour que le numérique porte un véritable renouveau de la croissance et de l’emploi. En avons-nous vraiment conscience ? Notre système d’enseignement et de formation est-il armé pour récolter les fruits des bouleversements en cours ? A suivre…

 

>>> Pour en savoir +

Le numérique et les datacenters en France

> Visuels utilisés pour ce billet :

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