« Si l’on cherche où se procurer un antidote à la morosité ambiante, Le Bourget est la bonne adresse ». Alors que le Président de la République vient de maintenir l’objectif d’une inversion de la courbe du chômage d’ici la fin de l’année malgré des perspectives d’embauches pour le moins frileuses, le journal Sud-Ouest se réjouit de l’ouverture du salon du Bourget aujourd’hui : l’aéronautique représentait plus de 100 000 emplois dans les seules régions Aquitaine et Midi-Pyrénées en 2011, près d’un sur cinq étant situé dans la seule agglomération toulousaine.
15 000 embauches prévues en 2013
« Certains leaders aéronautiques ayant un carnet de commandes plein pour les dix ans à venir, les DRH peuvent penser au futur », constate Emploi-Pro : à tous les degrés de qualifications, l’aéronautique s’affiche comme un des pionniers de la gestion anticipée de l’emploi et des compétences. Il s’agit de développer la formation et la gestion de carrière à destination des bac+2 au profil technique – eux aussi « pénuriques » – et d’absorber « des profils venus de filières en difficulté comme l’automobile », relève Claude Bresson, du Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas). Pour autant, les 15 000 projets de recrutement annoncés pour 2013 à l’échelle nationale se convertiront-ils tous en embauches ?
L’affaire n’est pas évidente : malgré le chômage, les employeurs du secteur industriel ont bien du mal à trouver les bons profils. Cette année, trois quarts d’entre eux anticipaient des difficultés à mener à bien leurs 1 400 projets de recrutement de cadres et d’ingénieurs.
Face à ces difficultés, l’intérim vient à la rescousse du dynamisme de l’industrie aéronautique. Manpower, qui sera présent au Bourget, dispose d’un tissu d’agences spécialisées dans l’aéronautique et a développé toute une gamme de solutions d’aide à la mobilité géographique vers ce secteur. L’année dernière, ce sont près de 1 000 intérimaires venus de l’automobile qui ont pu se reconvertir – des agents de fabrication automobile devenant monteurs-câbleurs aéronautiques par exemple.
« Plus mobiles, plus imaginatifs, multicompétents »
Dans leur guide des métiers de l’aéronautique, Emploi-Pro, L’Usine Nouvelle et le Gifas listent les compétences recherchées par les employeurs du secteur – PME comme grands groupes – pour faire vivre l’impressionnant dynamisme du secteur (Airbus a embauché 10 000 salariés ces deux dernières années et ses carnets de commande « sont déjà pleins pour les 7 années à venir »…). Verdict : « Pour travailler dans l’aéronautique, soyez multicompétents ».
Les multicompétents
Observables dans de nombreux secteurs, à commencer par le numérique ou le développement durable, les besoins en doubles compétences s’affirment comme une nouvelle donne du recrutement. L’industrie américaine cible de plus en plus les compétences dites transversales, jusqu’à faire émerger la notion de « col gris ». Pour Thierry Regond, PDG d’une entreprise spécialisée dans des solutions technologiques pour l’aéronautique, cette évolution est liée à celle du secteur, de plus en plus concurrentiel : les doubles compétences technico-commerciales, qui mêlent « grande curiosité technique » et capacité à « aller chercher le client » et « comprendre ses besoins », deviennent très recherchées.
Enjeu de longue date dans les PME, les multicompétences sont aussi recherchées dans les grands groupes : à Airbus par exemple, « 10% des effectifs sont mobiles », relève Emploi-Pro, sur le plan géographique, mais aussi d’un service à un autre. Avec des parcours professionnels toujours plus mobiles et divers, les profils multicompétents constituent « la » cible de recrutement du secteur.
Les optimisateurs
[encadre]Parmi les métiers en émergence récemment dépeints par l’Apec, les profils d’optimisateur tiennent une large place : celui qui occupe ce type de fonctions « recherche une meilleure rentabilité, une meilleure maîtrise des coûts, et développe pour cela des outils de pilotage et des indicateurs de performance. Garant de la qualité, il a pour fonction d’éviter toute déperdition voire toute approximation. »
L’aéronautique est un très bon exemple de cette tendance à la « chasse aux gaspi » : les sous-traitants, note Emploi-Pro, cherchent des « ingénieurs méthode, ingénieurs qualité, des spécialistes de la supply chain, des pros du lean manufacturing ».
Les profils « verts »
Réduction des dépenses en kérosène et nouvelles normes environnementales obligent, « les motoristes et de plus ou plus les sous-traitants investissent dans la R&D pour construire des avions plus légers et consommant moins, voire des énergies alternatives », indique le directeur d’un cabinet de recrutement. A nouvelles activités, nouveaux besoins : sont ciblés les « ingénieurs développement mécanique, les ingénieurs matériaux, les chimistes, les ingénieurs en propulsion et en aérodynamisme ».
Les profils technologiques
On estime que 90% des emplois feront appel à des compétences technologiques en 2015. L’aéronautique est à la pointe de cette mutation : « l’informatique et l’électronique prenant une place grandissante dans les avions, les industries cherchent assidûment des ingénieurs en électronique embarqué et des programmeurs », souligne un directeur de formation. Au-delà des savoir-faire, l’expérience concrète – pour être rapidement opérationnel – et la capacité d’adaptation sont des facteurs décisifs d’employabilité.
Le verdict de ce tour d’horizon est sans appel, « la totalité des spécialistes interrogés » soulignent l’importance d’un trait de caractère : le goût du risque. Candidats, osez !