« C’est honteux de dormir jusqu’à midi, Papa il travaille. De notre temps on n’aurait jamais fait ça. Jamais! », lançait la mère dans « Passe ton bac d’abord » (de Maurice Pialat) à ses enfants oisifs, sans motivation et sans perspectives, dans une région de Lens dévastée par le chômage.
Sans diplôme, t’as plus rien
Le problème c’est que, aujourd’hui, un paquet de jeunes risque de passer beaucoup de temps à le perdre : sortir du système scolaire sans diplôme, en France, a des conséquences graves. Encore plus depuis la crise.
Ils sont entre 120 et 150 000 « décrocheurs » qui, chaque année, quittent l’école sans le moindre diplôme. Ceux-là risquent une grosse galère : 3 ans après avoir quitté l’école, moins d’un sur deux aura un emploi, nous apprend l’enquête « Génération 2007 » du Centre d’études et de recherches sur les qualifications (Céreq).
Chaque année, 60 000 nouveaux galériens au minimum, soit un jeune sur six, c’est énorme ; d’autant plus que, aux dernières nouvelles, ils sont encore plus nombreux cette année (le ministre de l’Education a recensé 223 000 décrocheurs en 2011…).
Une dynamique très inquiétante, car la crise fait des ravages : l’enquête du Céreq montre que parmi les jeunes – classe d’âge déjà la plus touchée par la crise -, ce sont les non diplômés qui en ont été les premières victimes.
A tous âges de la vie, le taux de chômage des non-diplômés est près de trois fois supérieur à celui des diplômés d’études supérieures. Depuis la crise, la différence s’est accrue. C’est pourquoi le Céreq affirme, chiffres à l’appui, que « le diplôme est un atout gagnant« : « [les non diplômés] sont les plus exposés à la précarité et au chômage, d’autant plus en période de crise. Pour les diplômés du supérieur, les effets de la crise sont moindres. » En d’autres termes : les plus fragiles ont été fragilisés, les autres sont relativement protégés.
3 ans après leur sortie du système scolaire, moins de la moitié des non diplômés, plus des 2/3 des diplômés du secondaire et plus des 4/5ème de ceux du supérieur ont un emploi : il n’y a pas photo, le jeu du diplôme en vaut la chandelle.
Plus c’est long, meilleur c’est
Plus le diplôme est élevé moins le risque de chômage est grand. On le savait, la crise a renforcé cette évidence. Mais qu’est-ce qu’un « diplôme élevé », au juste ?
L’INSEE a récemment démontré que plus l’on quitte tôt le système scolaire, plus les trajectoires professionnelles sont instables et marquées par le chômage. A l’inverse, plus les études sont longues, moins le risque de chômage est élevé.
Enseignement professionnel, mon général !
La France ne porte pas l’enseignement professionnel en haute estime. Pourtant, l’enquête « Générations » du Céreq montre que parmi les diplômés « 2007 » de l’enseignement supérieur, l’insertion des jeunes issus des cursus professionnels est plus aisée que celle des diplômés de l’enseignement « général« . Pour décrocher un boulot, mieux vaut avoir un Bac pro qu’un Bac général : ¾ des titulaires du premier sont en emploi 3 ans après leur sortie du système éducatif, contre à peine plus d’un titulaire du bac général sur 2 (55%).
Surtout, la comparaison paraît largement à l’avantage de la filière professionnelle au niveau de la licence. Trois années après leur sortie du système scolaire, les titulaires d’une licence pro sont, certes, moins souvent cadres que les diplômés de licence général, mais ils sont :
- Plus souvent en emploi que les diplômés de licence générale (88% contre 75%),
- Moins souvent au chômage,
- Plus souvent stabilisés sur le marché du travail (80% en emploi à durée indéterminée, contre 70% ),
- Mieux rémunérés (+ 200 euros de salaire net moyen).
A méditer lors de vos choix d’orientation ou de ceux de vos enfants. Car, avec la crise, le décrochage peut entraîner des blessures et des séquelles de plus en plus douloureuses et profondes.
> Visuels utilisés dans ce billet :
- Direction, par Ramkarthikblogger, sur Flickr sous licence CC
- Affiche du film « Passe ton bac d’abord », sur le blog http://profshistoirelcl.canalblog.com
- Graphiques et image du Céreq