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Managers, dirigeants : quel leadership en temps de crise ?

Alors que le mythe de l’homme providentiel disparaissait progressivement des imaginaires politiques et entrepreneuriaux au profit d’expressions plus collectives, la pandémie de Covid-19 a ravivé le besoin de personnalités fortes capables de fixer un cap. Également appelée leadership, cette aptitude à inspirer et mener un groupe prend toutefois une tonalité particulière en temps de crise.

Ces dernières années, la recrudescence des phénomènes de burn-out et d’absentéisme au sein des entreprises avait souvent pointé du doigt la hiérarchie. Les équipes managériales, décrites comme adeptes d’un contrôle « à l’ancienne », ont été remises en question tandis que des modèles alternatifs à l’entreprise verticale émergeaient. Faisant la part belle à la responsabilité individuelle, la confiance et l’autonomie des salariés, ces modèles ont parfois amoindri l’importance du rôle de leader… jusqu’à la pandémie de Covid-19.

 

Le besoin de leadership en temps de crise

En charriant son lot d’incertitudes, en bouleversant les repères de chacun, la crise sanitaire a exacerbé les forces et les faiblesses des pays comme des organisations. Elle a redistribué les responsabilités et redéfini la notion de solidarité. Dans ce contexte et ce tumulte inédits, la nécessité d’être guidé a alors rendu sa valeur à la fonction dirigeante.

Côté politique, le chef de l’État a vu sa courbe de popularité grimper dans les sondages. Jugé crédible dans sa gestion de la crise, sa côte de confiance s’établit désormais entre 35% et 40% selon les instituts. Côté entreprise, plus de 9 Français sur 10 estimaient en avril dernier que les dirigeants avaient un rôle important à jouer pour faire face à la crise. Un plébiscite qui valorise notamment leur capacité à animer des équipes et mobiliser les talents dans une situation d’urgence. « Nous sommes loin de l’image de la lutte des classes et de la défiance qui a longtemps touché les dirigeants d’entreprises, souligne Frédéric Dabi, Directeur général adjoint de l’IFOP. L’opinion semble avoir dépassé la ‘bataille d’Hernani pro ou anti-patrons’.»

 

Priorité à l’engagement

Si un retour du leadership est attendu, celui-ci doit toutefois tenir compte des nouvelles attentes de la société en matière d’engagement social, citoyen, environnemental de l’entreprise. Premier impératif, a fortiori lors d’une crise qui menace la santé : donner la priorité à l’humain. Une occasion pour les dirigeants de valoriser leurs soft skills, ces qualités comportementales de plus en plus recherchées parmi les collaborateurs et dont les managers ne sont pas exempts. « Le management de la performance et la course à la productivité ont montré leurs limites face aux crises, explique Amélie Motte, déléguée générale adjointe du think tank La Fabrique Spinoza. Les nouvelles générations considèrent les organisations comme des lieux où elles doivent pouvoir s’épanouir. Le leader doit désormais inspirer, susciter l’engagement et la motivation. Un bon leader doit aujourd’hui être aussi un expert de l’humain… et donc des émotions»

Aux Etats-Unis, Mark Aslett, PDG de l’entreprise d’électronique aérospatiale et de défense Mercury Systems crée un fond de secours d’un million de dollars pour soutenir les employés et leurs familles lorsque la crise survient. L’industrie de la défense n’ayant pas été particulièrement touchée par la pandémie en raison de sa « nature essentielle », l’entreprise a pu engager 2,6 millions de dollars de dépenses : suspension des licenciements et mises à pieds, offre d’un crédit mensuel de 150 dollars pour commander des repas et rétablissement des soldes des congés maladie payés, etc. « Lorsque j’ai parlé aux actionnaires de ce que nous faisions, explique Mark Aslett, l’un d’entre eux m’a dit :Vous devriez considérer que c’est un autre investissement dans vos employés qui générera un multiple de cet investissement au fil du temps. L’empathie et l’attention dont vous avez fait preuve seront récompensées par la loyauté et la productivité des employés à l’avenir.’» En septembre 2020, Aslett est arrivé en tête de la liste de Glassdoor des 25 PDG les mieux notés pendant la crise aux Etats-Unis.

 

Un leadership nouveau au service de la transformation de l’entreprise

Dans la tempête, le rôle du leader est de donner le cap en fixant des priorités claires, même à moyen terme compte tenu des incertitudes. Son rôle est également d’accorder l’autonomie suffisante permettant aux collaborateurs d’agir au service de ces priorités. La transparence et la co-construction doivent en effet constituer le socle de l’action dirigeante. Ce sont elles qui donneront du sens à la crise, favoriseront la confiance et susciteront l’engagement des équipes. Parmi les modèles d’organisation compatibles avec des contextes incertains, le lean management s’appuie justement sur l’expertise des équipes et l’intelligence collective pour adapter et améliorer en continu la production de l’entreprise. Initié par le japonais Toyota, adopté depuis par Sanofi et Google, ce modèle revisite le rôle historique du manager en lien avec les attentes exprimées par les salariés. « Tout ce qui va vers plus d’autonomie, de flexibilité et de simplicité, participe au mieux-être des collaborateurs », confirme Julia de Funès, docteure en philosophie qui intervient auprès de grandes entreprises.

 

Toute crise ouvrant la voie à une remise en question, le Covid-19 pourrait-il devenir une opportunité d’expérimenter de nouvelles pratiques professionnelles, voire d’accélérer la transformation de l’entreprise. ? En adoptant les réflexes d’un leadership nouveau, plus humain, collaboratif, transparent, agile et flexible, les dirigeants ont la possibilité de mieux protéger l’environnement de leur entreprise et de tirer les leçons de cette crise… pour anticiper les prochaines.

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