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Limites du modèle allemand et compétitivité-qualité

Après le rapport de l’OIT qui mettait en avant le labor hoarding comme solution de préservation de l’emploi en Allemagne, l’exemple allemand continue d’inspirer. On peut notamment relever la récente contribution d’Olivier Ferrand (Président du think-tank Terra Nova) à la Revue Parlementaire qui, s’alarmant de la « désertification industrielle » de la France, soutient une stratégie de « montée en gamme ». Prenant le contre-pied de la politique menée depuis 12 ans en Allemagne, qui aurait largement affaibli la croissance de ce pays en le conduisant à une « compétitivité low-cost », il prône de s’inspirer de la tradition profonde de ce pays en mettant en place une politique de « compétitivité-qualité » qui viserait à « augmenter la productivité, c’est-à-dire la qualification ».

Si Olivier Ferrand s’appuie sur l’exemple allemand pour considérer que la désindustrialisation de la France n’est pas une fatalité (puisque « l’Allemagne a connu un essor remarquable sur la période, son industrie passant de 25% à 30% de la valeur ajoutée, avec une augmentation de l’emploi industriel et la restauration spectaculaire de son commerce extérieur »), il considère que les ingrédients de ce succès doivent être regardés comme un contre-exemple. Celui-ci reposerait en effet sur « une politique extrême et continue de baisse des coûts de production dans une logique de compétitivité-prix » avec, notamment, un gel des salaires nominaux pendant 7 ans et une baisse des charges sociales qui entraîna son pendant logique : la suppression des prestations sociales de l’Etat-providence.
Il ajoute que, si le commerce extérieur a été spectaculairement redressé outre-Rhin, « les résultats allemands sont tout simplement mauvais » en termes de croissance (celle-ci est de 0,8% en moyenne sur les années 2000-2009 contre 1,5% pour la France).

Source : The Economist

Selon Olivier Ferrand, « l’explication est simple : l’amélioration des exportations a été gagée sur la dégradation de la demande interne du fait de la rigueur salariale et de la suppression de prestations sociales, avec un effet nul sur la croissance globale – la baisse de la croissance interne a annulé la hausse de la croissance externe ». Un des résultats de cette tendance serait l’appauvrissement relatif des ménages en Allemagne : le PIB/habitant allemand était de 15% supérieur à la France à la fin des années 90, il est inférieur aujourd’hui.

Par ailleurs :

  • Les performances allemandes à l’export sont mises en danger par les déficits publics de ses partenaires commerciaux.
    Si les déficits publics ont été longtemps utilisés par les économies développées pour maintenir leurs demandes internes, la crise financière a agi comme une alerte montrant que ces pratiques ne pouvaient perdurer : les Etats vont devoir mettre fin à cette solution de facilité et, ce-faisant, l’Allemagne (dont près de la moitié des exportations s’effectuent à destination de pays européens -comme le rappelait récemment cet article de The Economist) risque de voir ses performances à l’export s’amoindrir.
  • La dette publique allemande est désormais la troisième la plus importante au monde.
    Selon les données publiées hier par Eurostat, celle-ci a augmenté de près de 10 points depuis 2009 et s’élève désormais à 83,2% de son PIB.

Le modèle allemand est donc loin d’être parfait. Néanmoins, la France pourrait s’inspirer des succès incontestables de l’Allemagne.

Tout d’abord, la flexibilisation de son marché du travail a sans conteste participé des performances remarquables de ce pays en termes de lutte contre le chômage.

Source : The Economist

De plus, une tendance lourde de l’exemple allemand semble soutenir ses performances sur le long terme : « la stratégie de compétitivité-qualité » qu’Olivier Ferrand appelle de ses vœux. En effet, l’une des forces de l’Allemagne est de vendre à l’étranger des produits et services à forte valeur ajoutée (automobiles haut de gamme, machines-outils, produits pharmaceutiques, production d’énergies renouvelables).
Pour cette raison, le président de la fondation Terra Nova estime que la montée en gamme de notre économie est une priorité économique. Ceci « nécessite d’investir dans l’économie de la connaissance : enseignement supérieur, recherche, innovation industrielle (dans les secteurs de croissance : énergies décarbonées, mobilité du futur, ville de demain, biotechnologies et sciences du vivant, société numérique …) », en investissant des sommes très importantes dans l’enseignement supérieur et la recherche.

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