:
Newsletter
HReview
Découvrez nos articles.
Retour à la liste
Partager sur :

TVA vs CSG : quel nouveau financement de la protection sociale ?

Ne plus faire reposer le financement de la protection sociale sur les seuls salaires et aider la compétitivité des entreprises en baissant leurs charges : l’objectif est partagé par tous. Mais il y a divergence sur la méthode : le Gouvernement a ainsi abrogé le projet de « TVA (taxe sur la valeur ajoutée) sociale » de Nicolas Sarkozy avant même son entrée en vigueur … mais réfléchit, dans le même temps, à une hausse de la contribution sociale généralisée (CSG) qui poursuivrait plus ou moins les mêmes buts. En fin de semaine dernière, Le Monde a analysé les différences entre ces deux taxes.

Le financement de la protection sociale ne peut plus reposer seulement sur les salaires. Frapper la consommation ou les revenus ?

Le diagnostic est partagé par tous : le maintien du « modèle social français » passe par un élargissement de la base de son financement.

« La France a de plus en plus de mal à financer sa protection sociale, qui est assise sur les salaires. Ce sont les 22 millions de salariés, mais aussi leurs entreprises, qui financent, par leurs cotisations, les allocations familiales ainsi que les indemnités de chômage, les pensions de retraite et l’assurance maladie. »

C’est pourquoi il fait aujourd’hui consensus qu’une partie des cotisations sociales doit être transférée sur une autre source, afin de diminuer les coûts des entreprises. Quelle nouvelle source de financement viendrait se substituer à une partie de ces cotisations sociales ? C’est là que les divergences apparaissent :

  • dans un cas, on taxe la consommation en augmentant la TVA ;
  • dans l’autre, le nouveau prélèvement est effectué sur les revenus, y compris ceux du capital, par le biais de la CSG.

La TVA « antidélocalisation », une arme à double tranchant

Aujourd’hui, la France est le deuxième pays européen où les salariés sont les plus taxés. C’est l’une des principales raisons pour lesquelles le sénateur Jean Arthuis promeut depuis longtemps la « TVA sociale » ; outre le transfert d’une partie du financement de la protection sociale sur la consommation, il s’agirait aussi d’alléger le coût du travail, donc de soutenir la balance commerciale et la « compétitivité-coût » : en payant moins de charges grâce à elle, les entreprises françaises produiraient pour moins cher, ce qui les aiderait à exporter ; à l’inverse, les produits importés en France seraient frappés par cette TVA majorée, donc plus chers, ce qui diminuerait leur attractivité pour les consommateurs français et aiderait les producteurs français à se battre avec eux sur le terrain des prix. C’est pourquoi la « TVA sociale » a été récemment rebaptisée « TVA antidélocalisation ».

A l’époque de la monnaie unique européenne, « c’est la seule dévaluation qu’on puisse encore se permettre », souligne Jean Arthuis. Mais ce système n’est efficace que si les entreprises baissent réellement leurs prix hors taxe. Car si elles l’utilisent pour restaurer leurs marges, les prix augmenteront mécaniquement du fait de la hausse de TVA, et l’inflation produite viendrait en partie annuler le gain de compétitivité.

Eric Heyer : nos partenaires européens ne joueraient pas le jeu, et la hausse de la TVA ne soutiendrait pas la compétitivité

Eric Heyer, économiste à l’Office français des conjonctures économiques (OFCE), juge que la TVA « sociale » risque de se retourner contre nous si nos partenaires européens « ne jouent pas le jeu ». Ce qui d’après lui est probable : alors que les échanges commerciaux de la France se font à 70 % avec l’union européenne et à 50 % avec la zone euro, « les autres Etats de la zone euro ne vont pas se dire : ‘Un des plus gros pays de la zone fait de la dévaluation compétitive et on va le laisser faire.’ Ils seront tentés de faire la même chose », annulant de fait l’avantage pour la France. Pour lui, la TVA « sociale » n’est donc pas appropriée à une conjoncture morose comme actuellement ; d’autant qu’elle contredit les principes de solidarité européenne (un argument qu’Olivier Ferrand opposait d’ailleurs au « modèle allemand ») : « on a créé l’euro pour cesser de pratiquer la dévaluation compétitive entre pays européens ».

Jean Arthuis considère que, même avec une utilité en termes de compétitivité amoindrie par l’éventuelle réaction de nos partenaires commerciaux, l’intérêt de la « TVA sociale » demeurerait : « Même si les pays alentour le font, on aura au moins mis fin au scandale de ne faire contribuer que les salaires à la protection sociale ».

Vers une fusion entre l’impôt sur le revenu et la CSG ?

Un point semble néanmoins faire consensus entre MM. Heyer et Arthuis : si l’option de la CSG était retenue, il faudrait idéalement la fusionner avec l’impôt sur le revenu. C’était le sens d’une proposition des économistes Thomas Piketty, Emmanuel Saez et Camille Landais. Cette réforme rendrait la CSG « progressive » (son taux augmente avec les revenus) alors qu’elle est aujourd’hui proportionnelle (un taux unique, quel que soit le niveau de revenus). Complexe à mettre en place, elle aboutirait à un impôt unique, prélevé directement à la source.

>>> Lire l’article du Monde

 

> Image de Une issue du flickrstream de stefdem, sous licence CC

Partager sur :

Autres articles pouvant vous intéresser