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Thierry Vaudelin : « L’articulation du CPF et du Dif, une usine à gaz »

État, Régions, organisations patronales et syndicales se sont retrouvées, ce mercredi 2 avril, pour discuter de la mise en oeuvre du compte personnel de formation, une des révolutions initiées avec la loi sécurisation de l’emploi votée en 2013. Ce nouveau compte, individuel et portable, est vu comme la formalisation légale d’un apprentissage tout au long de la vie devenu indispensable.

Lire Le compte personnel de formation ? Attendons 2025 !

La veille, 1er avril, l’association Centre-Inffo, se présentant comme un « lieu de ressources, d’analyse et d’information sur la formation professionnelle et l’apprentissage », organisait une matinée d’actualité consacrée au nouveau cadre juridique que la future loi instaure. C’est qu’entre le nouveau mécanisme en lui-même et les nouveaux financements, les choses sont loin d’être tout-à-fait claires…

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Dans quelle mesure la disparition du Dif (Droit individuel à la formation) va-t-elle impacter la réalisation des plans de formation ?

Thierry Vaudelin : Théoriquement cela ne devrait avoir aucun impact, car le plan de formation est réalisé par l’employeur et restera à sa charge, tandis que le Dif, mis en œuvre à l‘initiative du salarié, sera transféré vers le CPF, compte alimenté par une contribution de 0,2 % versée à l’Opca.

Si dans les faits le Dif était souvent mobilisé en complément du plan de formation, avec la réforme, des fonds seront affectés vers le CPF, en plus du budget Plan propre à l’entreprise. Car le Dif était en pratique un co-investissement et l’employeur pouvait refuser la demande du salarié. Tandis que le CPF pourra être opposable selon les situations. Notamment s’il n’a pas respecté ses obligations de réaliser un entretien professionnel tous les deux ans et un bilan tous les six ans dans les entreprises de plus de 50 salariés, puisque dans ce cas de figure le salarié verra abonder son compteur CPF de 100 heures de droit à la formation. Une disposition liée à la réforme des modalités de l’entretien professionnel visant, avec la création du conseil en évolution professionnelle, à donner aux salariés les moyens et les droits de se former et de construire leur projet de carrière.

« Près de 65 décrets sont attendus sur la mise en œuvre de la loi »

Comment sera financé le CPF ?

Principalement par les Opca pour les salariés via la contribution de 0,2 % CPF versée à l’Opca par les entreprises de plus de 10 salariés dans le cadre de leur contribution unique. Les modalités de fonctionnement de ce CPF sont encore mal définies, près de 65 décrets sont attendus sur la mise en œuvre de la loi, et notamment sur les modalités de gestion du CPF.

> Lire aussi : Accord formation professionnelle : 4 partis pris qui dessinent une révolution

L’accord de l’employeur pour un départ en formation restera nécessaire si la formation est sur le temps de travail, sauf en cas d’abondement correctif de 100 heures sur le CPF ou pour les formations hors temps de travail : dans ce cas, la formation sera opposable à l’employeur. Les formations devront être qualifiantes, certifiantes, relever du socle de compétences ou être définies comme éligibles par les listes d’inventaire des partenaires sociaux de la branche.

Ainsi, toutes les formations ne pourront relever de ce dispositif. Par exemple, il ne sera pas possible de faire financer une formation de développement personnel sur la gestion du temps ou une formation perfectionnement sur un logiciel et il y aura bien sûr des plafonnements mis en place par les Opca. Pour les demandeurs d’emploi, Pôle emploi et les Régions pourront procéder à des abondements.

« La loi la plus importante depuis 1971 »

Comment seront financés les plans de formation ?

C’est l’une des grandes évolutions de la nouvelle loi. Car les entreprises devront financer leur plan de formation en plus de la contribution de 1 % (pour les entreprises de 10 salariés et plus) versée à l’Opca. Les obligations d’adaptation au poste de travail ou de garantie d’employabilité du salarié demeurent pour l’employeur.

Cela signifie qu’une entreprise devra toujours former à l’intégration ses salariés sur les fondamentaux permettant d’occuper leur poste de travail et tout au long de leur présence dans l’entreprise, pour leur permettre de maintenir les compétences et une employabilité interne ou externe. Ces principes d’obligation pour l’employeur restent et nécessitent donc qu’il poursuive son investissement formation Plan sur ses fonds affectés pour l’occasion.

Comment vont s’articuler le CPF et le Dif jusqu’au moment où ce dernier disparaîtra ?

Cette loi est certainement la plus importante depuis 1971, mais elle a créé sur cette question une usine à gaz. Le système de comptabilisation pour le CPF est particulièrement complexe, notamment sur la question du transfert des heures acquises au titre du Dif vers le compteur CPF. Car les heures acquises au titre du Dif jusqu’au 31 décembre 2014 seront mobilisables en CPF jusqu’en 2021 au plus tard. Il y aura donc les salariés qui auront acquis au titre du Dif 120 heures, puis un compteur CPF sera activé dès janvier 2015 avec un plafond total de 150 heures. Ce sera extrêmement compliqué à gérer pour les entreprises et les modalités de calcul et de suivi de ces compteurs sont encore à définir à ce jour.

> Interview réalisée par Cédric Morin, initialement publiée dans le Quotidien de la formation. Liens et images Atelier de l’emploi. Crédit soho42/flickr (licence CC)
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