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Les opportunités des « technologies perturbatrices »

La Harvard Business Review a tout récemment réédité un article, écrit par Joseph L. Bower et Clayton M. Christensen en 1995, intitulé « Saisir les opportunités des technologies perturbatrices » (« Disruptive technologies, catching the Wave »)

Alors que l’Atelier de l’Emploi publie une série de billets portant sur « le monde du travail demain », à l’époque où les nouvelles technologies révolutionnent – ou sont sur le point de révolutionner- la vie économique (donc le travail), indiquant combien il est déterminant pour les entreprises de se réinventer radicalement (sous peine de disparition…), la réédition de l’article de de Joseph  Bower et Clayton Christensen présente un intérêt certain.

En effet, partant du constat selon lequel les entreprises dominantes négligent les nouvelles technologies susceptibles de satisfaire une demande future, il décrypte les raisons de cette lacune, qui menace leur existence-même, et formule des recommandations pour leur permettre d’y remédier.

Joseph L. Bower et Clayton M. Christensen expliquent que les “technologies perturbatrices” sont potentiellement dangereuses pour le business des entreprises dominantes car, généralement sous-estimées lors de leur apparition, elles finiront à terme par détourner une grande majorité des clients. De nombreux cas, comme celui d’IBM, l’ont montré.

Voici ici une traduction du début de l’article, que les abonnés à la Harvard Business Review pourront lire dans son intégralité.

« Les entreprises leaders de leur marché perdent généralement leur position dominante lorsque les technologies ou la structure de leur marché change, comme ce fut le cas de Goodyear et de Firestone lors de l’arrivée du pneu « radial », ou de Xerox lorsque Canon créa le marché du photocopieur de petite taille. Le marché informatique regorge d’exemples de ce type d’échecs :

  • Avec l’émergence des mini ordinateurs, bien plus simples en termes technologiques que les PC à unité centrale, IBM a été pendant des années écarté de ce nouveau marché.
  • Apple a dominé le marché des ordinateurs personnels et a créé la norme de l’ordinateur à usage facile, mais pris 5 ans de retard derrière les leaders de l’ordinateur portable.

Comment expliquer que de telles entreprises investissent massivement – et avec succès- dans les technologies afin de conserver leurs clients actuels mais omettent d’effectuer les investissements technologiques qui satisferont la demande future? Certes, la bureaucratie et l’arrogance des puissants constituent des éléments d’explication. Mais la raison fondamentale est à trouver dans le fait que les entreprises leaders sont victimes de l’un des dogmes les plus populaires et les plus rémunérateurs de la vie des affaires : la nécessité de rester au plus près du client.

Alors que la plupart des dirigeants aiment à croire qu’ils dirigent, ce sont les consommateurs qui exercent en réalité le pouvoir de direction des investissements d’une entreprise. Avant de lancer une technologie, développer un produit, construire une usine ou établir de nouvelles chaînes de distribution, les managers doivent se focaliser sur leurs clients : le veulent-ils? Quelle sera la taille du marché ? L’investissement sera-t-il rentable ? Ces questions servent à ce que les investissements soient parfaitement en phase avec les besoins des clients.

Mais qu’advient-il si les consommateurs rejettent une nouvelle technologie, un nouveau produit, un nouveau concept ou une nouvelle façon de procéder au motif que ces nouveautés ne répondent pas à leurs besoins aussi bien qu’avant ? Dans le cas d’IBM, par exemple, les clients grands comptes (marques commerciales, gouvernements, industries) n’ont vu aucun intérêt immédiat aux mini-ordinateurs. Donc l’entreprise a écouté ses clients…avec les résultats que l’on connaît.

Ce type de réaction a été observé de manière récurrente dans notre étude. Celle-ci montre que les entreprises les mieux dirigées et établies sont significativement en avance sur leur industrie dans le développement et la commercialisation de nouvelles technologies tant que celles-ci répondent aux besoins d’efficacité à venir de leurs clients. Néanmoins, ces mêmes entreprises sont rarement à la pointe de la commercialisation d’innovations qui ne satisferaient pas dès l’origine les besoins de leurs clients principaux (et qui ne trouveraient d’abord à s’appliquer que sur des marchés petits ou émergents).

Les procédures d’investissement rationnelles, et analytiques, qui ont cours dans la plupart des entreprises bien dirigées ne se prêtent pas à l’identification des futurs besoins de leurs clients. En effet, répondre à la demande des clients établis et écarter les concurrents accapare déjà toutes les ressources de l’entreprise. Ce sont donc sur les marchés et clients actuels que les entreprises leaders se focalisent. Il s’agit pour elles d’éliminer tous les produits et technologies qui ne satisfont pas les besoins actuels des clients.

En réalité, les procédures et primes mis en place par les entreprises pour se focaliser sur leurs clients majeurs fonctionnent si bien qu’elles les rendent aveugles aux nouvelles technologies sur des marchés émergents… »

Pour résumer, le paradoxe expliquant le fait que les entreprises leaders negligent généralement les nouvelles technologies est qu’elles se focalisent par trop sur la demande actuelle de leurs clients. Si cette posture fait leur succès présent, elles risquent de se trouver fort dépourvues lorsque l’innovation se sera mieux diffusée…

Ainsi, Bower et Christensen recommandent aux dirigeants de :

  • Mettre en place des process à même de les aider à identifier les “technologies perturbatrices”.
    Parmi les indices permettant principaux figurent le désaccord entre les différents départements de l’entreprise : si le marketing et la finance estiment que le potentiel de développement d’une technologie est infime alors que les équipes en charge des développements techniques considèrent qu’un nouveau marché pourrait émerger, alors il s’agit très probablement d’une technologie pertubatrice à laquelle les dirigeants devraient prêter attention.
  • Créer des structures séparées de leur activité principale afin de pouvoir exploiter ces nouvelles technologies.
    Dans cette perspective, l’idéal est de créer un “projet pilote” (skunkwork) autonome, hors de la structure principale, afin que les priorités des affaires en cours n’empêchent pas le développement d’innovations qui permettront à l’entreprise de maintenir ou d’améliorer sa position dans le futur.

 

  • Lire la suite de l’article (en anglais), sur la Harvard Business Review.
  • Les 10 premières pages de l’article sont aussi disponibles en libre accès (en anglais et en pdf) ici.
  • Analyse de la théorie de l’article (en anglais) ici.
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