Depuis quelques mois, les fablabs – littéralement « laboratoires de fabrication » – pullulent en France, en Île-de-France, à Lille ou Lyon, mais aussi dans la Vienne, en Meuse, en Basse-Normandie, etc. Ce sont même 154 dossiers qui avaient été déposés pour répondre à l’appel à projets Fablabs, dont les résultats avaient été annoncés à la mi-décembre par Arnaud Montebourg et Fleur Pellerin.
> La carte, collaborative, des « laboratoires de fabrications et lieux associés en France » :
Centre de formation ET fablab
Mais ces ateliers de fabrication numérique ne sont pas que des paradis pour « makers », bidouilleurs et tenants de l’innovation collaborative :
« Un fablab, même modeste, a sa raison d’être en formation professionnelle : parmi les jeunes que nous avons accompagnés, il y a des «décrocheurs», qui ont quitté prématurément le système scolaire et manifestent peu d’enthousiasme dans un cadre d’apprentissage classique. Notre constat, c’est qu’ils sont beaucoup plus motivés ! »
Interrogé par Inriality, c’est ainsi que Mathieu Gauzins présente le projet Formalab, « fablab dédié à la formation » né il y a près de deux ans au Puy-en-Velay avec le soutien du programme d’éducation et de formation tout au long de la vie de la Commission européenne. La Commission, très active sur le volet du besoin de formation en compétences « STEM » en Europe (voir la « grande coalition » lancée début 2013 et ses 100 000 nouveaux stages de formation dans le numérique récemment annoncés à Davos), a ainsi contribué à financer ce Fablab à la mission particulière : « mettre en place une méthode de formation aux compétences clés, pour de jeunes adultes éloignés de l’emploi, en se basant sur le principe des FabLabs ».
Ces principes ? La gratuité, la démocratisation de l’accès aux outils et machines, des méthodes collaboratives, innovantes et ouvertes (insérées dans des « communautés de partage »), associant les bénéficiaires de la formation dans la conception même de celle-ci. S’adressant à un public non-technophile, FormaLab s’est associé avec d’autres établissements d’innovation pédagogique (le Timelab, à Gand, ou ITD, à Barcelone) pour mêler son identité de Fablab à celle de centre de formation, sur un vaste ensemble de compétences, mais visant particulièrement des jeunes « en parcours d’insertion pour travailler dans l’industrie ou pour s’engager dans une formation qualifiante préparant aux métiers de ce secteur ».
« Apprendre à apprendre », le retour
Une solution miracle alors que « l’industrie numérique ne fait pas rêver les jeunes », comme l’écrit Le Monde, et que les emplois non pourvus sont légion dans l’ensemble de l’industrie ? L’objectif, en tout cas, est bien de motiver la formation dans l’industrie, notamment via le projet Déclic’Industry. Mais il s’inscrit, plus globalement, dans une logique d’apprentissage aux compétences transversales, ces compétences d’adaptation (pensée critique, capacité d’analyse, compétences relationnelles, etc.) utiles dans des environnements de travail et des parcours professionnels toujours plus mouvants.
Les nouvelles pédagogies visant à « apprendre à apprendre » connaissent un renouveau récent avec une série d’innovations qui redessinent les programmes de formation continue. « Apprendre à résoudre des problèmes existants, apprendre à résoudre de nouveaux problèmes et enfin apprendre à définir et résoudre de nouveaux problèmes », ces trois niveaux d’intelligence appellent ainsi, selon François Taddéi, cofondateur du Centre de Recherches Interdisciplinaires, à innover et développer toutes sortes de plateformes d’apprentissage collaboratif et d’« écosystèmes de connaissance » d’un nouveau genre.
Pourquoi la formation continue s’empare-t-elle, à son tour, de ces enjeux ? Le décloisonnement des lieux de savoir, avec ces entreprises qui s’intéressent de plus en plus aux fablabs, mais aussi aux MOOC ou au design thinking, sert autant la nécessité de développer la créativité de ses salariés qu’à développer et mettre à jour leurs compétences. Dans le cas de Formalab, le défi va même jusqu’à raccrocher à l’emploi… Les fablabs, un autre souvenir à ramener de la Silicon Valley pour François Hollande, en visite mercredi dans la « Bay Area » ?
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